Caisse unique: Alain Berset va présenter un contre-projet

Alain Berset a présenté mercredi un contre-projet indirect à l'initiative pour une caisse maladie unique. Il vise à limiter la concurrence, notamment en séparant les assurances de base et complémentaires. Les initiants ne retirent pas leur initiative. Pour la droite, les deux projets sont à rejeter.

Le Conseil fédéral a décidé mercredi de rejeter l'initiative. Il a chargé le ministre de la santé d'élaborer des propositions qui devront encore être mises en consultation avant que le Parlement ne se prononce.

«Le modèle actuel repose sur une concurrence régulée, ne connaît pas de contingent de prestations et n'a pas de dettes», a relevé Alain Berset en conférence de presse. Mais il pêche surtout par la sélection des risques qui mine la confiance des assurés dans le système. «Dans certaines régions, les primes pour adulte peuvent varier du simple au double», a-t-il rappelé.

Le contre-projet sera décliné en trois points. Le Département fédéral de l'intérieur (DFI) souhaite premièrement séparer les assurances de base et complémentaires.

Elles devront à l'avenir être offertes par des entités juridiques distinctes qui ne pourront pas échanger d'informations entre elles ou procéder à des financements croisés. Il a rappelé qu'actuellement 46 assureurs sur 64 ne pratiquent que l'assurance de base.

Deuxième mesure: la création d'une réassurance pour les très hauts coûts sous la forme juridique d'une fondation. Cette réassurance sera obligatoire et uniforme pour tous les assureurs. Elle se chargera, à partir d'un certain seuil, des coûts élevés d'un assuré.

Un montant fixe prélevé sur les primes financerait la réassurance. Vu les différences de coûts entre régions, ce montant varierait d'un canton à l'autre.

Interrogé sur le seuil à partir duquel le fonds de réassurance prendra le relais de l'assurance de base, Alain Berset a indiqué que ses service planchaient sur une fourchette allant de 5000 à 20'000 francs. «4% des assurés génèrent des coûts annuels de plus de 15'000 francs, ce qui représente 52% des coûts de la santé, 1% dépasse les 35'000 francs et constitue 21% des coûts globaux», a-t-il rappelé.

«Pour l'assuré, la seule conséquence visible sera de ne plus se voir offrir d'aussi grosses différences de primes dans sa région», a dit le conseiller fédéral. Il n'a pas à craindre d'être transféré dans une autre caisse, un éventuel dépassement de ses coûts étant entièrement géré par son assureur.

La troisième mesure envisagée réside dans le renforcement de la compensation des risques. Le gouvernement veut ajouter un nouveau critère: les coûts des médicaments.

Pour le socialiste, ces trois mesures inciteront les caisses à se réorienter sur la qualité de leurs prestations plutôt que de privilégier la chasse au «bon risque». La nécessité de constituer réserves sera aussi moins importante.

Le comité d'initiative «pour une caisse maladie publique» salue le contre-projet du gouvernement. «C'est la première fois que le Conseil fédéral reconnaît qu'il y a des problèmes avec le système actuel». Les initiants ne retireront toutefois pas leur initiative, un projet «plus concret et plus complet».

L'initiative prévoit la création d'une institution nationale d'assurance maladie unique avec des agences cantonales qui établiront les primes et les encaisseront. La gauche, les syndicats, des associations de défense des patients et de consommateurs l'ont lancée pour mettre fin à ce qu'ils estiment une fausse concurrence entre les 80 caisses privées actuelles.

De son côté, santésuisse se dit favorable «à toute amélioration du système de santé» en général, mais seule la compensation des risques trouve grâce à ses yeux. La séparation entre assurance de base et complémentaire est vue comme une mesure qui «contribuerait à renchérir tout le système» en créant une double administration, écrivait Christoph Meier, direction de santésuisse, dans un éditorial du magazine «infosantésuisse» du 4 septembre dernier.

Pour le PDC, c'est la création d'une réassurance pour les très hauts coûts qui pose problème. Il s'agit d'une manière détournée d'introduire une caisse unique, fustige Marianne Binder, porte- parole du parti, ajoutant que le PDC est opposé toute «médecine étatique».

Même constat chez les libéraux-radicaux. Le PLR soutient toutefois une amélioration de la compensation des risques. Une initiative parlementaire du parti à ce sujet sera d'ailleurs discutée vendredi aux Chambres fédérales. L'UDC, interrogée par l'ats, n'a pas souhaité prendre position pour l'instant sur cette question. (ats)