Suicides - FranceTélécomDes ex-dirigeants convoqués chez le juge
Trois anciens dirigeants de France Télécom dont l'ex-PDG Didier Lombard sont convoqués mercredi et jeudi par un juge dans le cadre de l'enquête sur la vague de suicides chez l'opérateur téléphonique.
Didier Lombard, ancien patron de France Télécom (2005-2010), a été entendu mercredi matin par le juge Pascal Gand alors que l'ancien directeur des ressources humaines Olivier Barberot devait l'être dans l'après-midi. Louis-Pierre Wenes, l'ex-numéro deux de l'entreprise, est attendu jeudi matin.
Ces auditions pourraient déboucher sur des mises en examen pour «harcèlement moral». «On peut le penser et l'espérer», a réagi Me Frédéric Benoist, avocat de parties civiles, qui estime néanmoins «cette qualification réductrice par rapport à la réalité du dossier». Pascal Gand peut également décider de les placer sous le statut de témoin assisté.
Me Benoist aurait préféré que l'infraction de «mise en danger d'autrui» soit retenue, tout comme Sébastien Crozier, représentant le syndicat CFE-CGC, partie civile.
une centaine de suicides
«On considère que la qualification des faits en harcèlement moral est insuffisante car il y a des morts, près d'une centaine de suicides pendant la présidence de M. Lombard», a déclaré le représentant syndical à l'Associated Press. «Mais tous n'ont pas un lien direct ou indirect» avec la situation à France Télécom, a-t-il rappelé. Selon lui, «il s'agit de déterminer la part de responsabilité de la direction».
Le groupe a été frappé par une grave crise sociale marquée par plusieurs dizaines de suicides entre 2008 et 2010. Cette crise a entraîné le départ du PDG Didier Lombard, remplacé par Stéphane Richard le 1er mars 2010, et la mise en cause de la politique managériale de l'entreprise, incarnée à l'époque par le N 2 Louis-Pierre Wenes.
Une information judiciaire pour «harcèlement moral» a été ouverte en avril 2010, l'instruction étant confiée au juge Pascal Gand. Elle fait suite à une plainte déposée le 10 décembre 2009 par le syndicat Sud pour «harcèlement moral» et «mise en danger de la vie d'autrui» contre Didier Lombard et deux autres hauts responsables et à un rapport de l'Inspection du travail remis le 4 février de la même année au parquet de Paris.
harcèlement moral
Dans son rapport transmis au procureur de la République, l'Inspection du travail a considéré que les objectifs assignés dans le plan de restructuration de France Télécom en 2004 pouvaient s'apparenter à du harcèlement moral, notamment vis-à-vis des fonctionnaires qui ne pouvaient être licenciés. Il s'agissait d'augmenter la productivité, de supprimer 22.000 emplois, de changer 10.000 personnes d'affectation, d'augmenter la mobilité et de rajeunir la pyramide des âges.
Les fonctionnaires concernés par ces objectifs auraient été mis sur la touche, incités à changer de poste ou cantonnés à des fonctions dévalorisées, estime ce rapport. Au total, 14 cas de suicides, tentatives de suicide ou dépression sont considérés par l'Inspection du travail comme en lien direct avec cette politique managériale également mise en place à Orange.
«On ne peut pas parler de politique de harcèlement moral, il faudra replacer chacun des suicides dans leur contexte», avait déclaré l'avocate de France Télécom, Claudia Chemarin, lors d'une conférence de presse en avril 2010. En avril 2011, un salarié de 57 ans s'est suicidé en s'immolant par le feu mardi matin sur le parking du site France Télécom Entreprises où il travaillait, à Mérignac-Pichey (Gironde). (ap)