Street View en Suisse: Google devra flouter les visages à la main

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Street View en SuisseGoogle devra flouter les visages à la main

Google ne peut pas se contenter de masquer 99% des données sur Google Street View. Tous les visages ou plaques de voiture devront être floutés sur les pages suisses. Manuellement s'il le faut.

Le Tribunal administratif fédéral (TAF) donne raison au Préposé fédéral à la protection des données. Ce dernier salue avec «grande satisfaction» cette décision, alors que Google affiche sa déception.

Actuellement, 99% des visages qui apparaissent sur Google Street View sont automatiquement rendus méconnaissables, selon les estimations du Préposé fédéral Hanspeter Thür. Les autres devront être retravaillés manuellement.

Accord indispensable

L'intérêt économique de Google doit céder le pas face à la protection de l'image de chaque individu, juge le TAF. L'arrêt rappelle qu'il est en principe interdit de photographier un individu sans avoir eu son approbation. Cette règle reste valable même si les personnes photographiées ne sont que des éléments secondaires destinés à animer les illustrations du service en ligne.

Chacun a droit à sa propre image, qui fait partie du droit de la personnalité, souligne le TAF. Dans le domaine de la protection des données, le droit à l'autodétermination en matière d'information est garanti par la Constitution fédérale. Cela signifie que chaque individu a le droit de disposer des données personnelles qui le concernent.

Le TAF tient à préciser qu'il ne s'agit pas d'interdire Google Street View, mais simplement de ne publier sur internet que des images qui protègent le droit de la personnalité.

Cette protection doit être respectée plus particulièrement à proximité d'endroits sensibles, tels que des hôpitaux, des prisons ou des maisons de protection de la femme, ont rappelé lundi les services du Préposé fédéral à la protection des données.

Arguments économiques

Les arguments économiques avancés par Google, qui craint d'importants surcoûts lorsque certaines images devront être retravaillées manuellement, ne remettent pas en question cette appréciation.

«Cet effort supplémentaire ne devrait pas être de nature à remettre en cause la viabilité économique de Google», affirme le TAF. Car il serait possible d'envisager une répercussion des coûts sur les utilisateurs de Google Street View. Même si le service est gratuit, il est indéniable qu'il poursuit un but à caractère économique.

Recours possible

En ligne depuis mai-août 2009, Google Street View a immédiatement suscité une intervention du Préposé fédéral, qui a émis des recommandations. Désavoué par le TAF, Google Street View est placé dans l'alternative d'accepter le verdict des juges administratifs fédéraux ou d'opter pour un ultime recours au Tribunal fédéral.

Google entend examiner cette possibilité, a indiqué lundi le groupe à l'ATS. La société relève que ce service s'est révélé utile pour des millions de Suisses ainsi que pour des entreprises et des institutions touristiques. Depuis le lancement de Google Street View, un quart des Suisses y ont déjà recouru, note le groupe.

Informer la population

Interrogé par l'ATS, Jean-Philippe Walter, le suppléant de Hanspeter Thür, se réjouit que le TAF reconnaisse que les images diffusées par Google sont bien des données personnelles et sont donc soumises à la loi sur la protection des données.

Il est aussi satisfait d'avoir obtenu gain de cause concernant l'information à la population. Google devra ainsi informer une semaine avant ses prises de vues non seulement sur Internet, mais aussi dans les médias locaux.

S'agissant de lieux privés comme des jardins ou des cours intérieures de maisons, les images de Google Street View ne devront pas montrer davantage que ce que peut voir un passant normal, relève encore M. Walter. (arrêt A_7040/2009 du 30 mars 2011) (ats)

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