GenèveVotations: lesbienne violemment agressée
A Genève, la campagne visant à punir l'homophobie libère une parole décomplexée et attise la haine.
- par
- Maria Pineiro

«Sale gouine qui ne devrait pas exister, qui mériterait qu'on lui foute le feu.» Dimanche 26 janvier, Jehanne est entrée dans le tram en arborant le badge «Contre les discriminations, oui», qui invite à étendre les poursuites pénales aux cas de discrimination et d'incitation à la haine en raison de l'orientation sexuelle. Cette prise de position lui a valu de violentes insultes de la part d'un autre passager. «Il devait avoir entre 20 et 30 ans et portait une capuche. Il s'en est pris verbalement à moi, à cause de ce badge, puis a fait mine de me donner un coup de poing avant de quitter le tram. Quand il est sorti, je me suis rendu compte que je pleurais et tremblais», a-t-elle témoigné, encore choquée que ce pin's lui ait valu tant de violence. «Cela aurait pu arriver à un allié hétérosexuel.»
La Fédération genevoise des associations LGTB, qui a rapporté les faits, a affirmé que l'homme a indiqué à sa victime profiter de «le faire avant le 9 février, vote après lequel on ne pourra plus dire ce qu'on veut». La faîtière a également expliqué qu'aucune personne présente n'avait réagi. «C'est la première fois que je subis une agression à cause de mon orientation sexuelle, a précisé Jéhanne, qui a porté plainte. C'est une manière de lutter contre le sentiment d'impuissance.» Les policiers qui ont recueilli son récit se sont montrés déterminés à utiliser les preuves, photos et images de caméras de vidéosurveillance. Mais le caractère lesbophobe de son agression n'a pas pu être retenu, faute de base légale. «Je veux montrer que ces violences verbales ou physiques existent et à quel point il est important de se rendre aux urnes.»
Loi sur la discrimination: pour et contre
Le 9 février, le peuple étendra ou non la loi contre les discriminations. Certains craignent une forme de censure et remettent en question les violences subies par les LGBT.
La plainte est confirmée par la police genevoise. Le type d'insultes a bien été précisé dans le texte. Mais cet épisode sera comptabilisé dans la statistique globale des agressions. Les forces de l'ordre ne tenant pas de statistiques spécifiques sur les faits homophobes.
Parole décomplexée
Votation sur l'intégration des discriminations et incitations à la haine en raison de l'orientation sexuelle dans le code pénal oblige, la communauté LGBT est plus visible. L'activité militante et le débat public ont eu pour corollaire «une certaine parole décomplexée qu'on entend plus fréquemment, notamment lors de tractages», confirme Matthias Erhardt, coprésident de la Fédération. Les personnes qui sont en désaccord avec notre position nous le font parfois savoir de manière particulièrement virulente, voire violente.»
Norme antiraciste : Décryptage
Le 9 février, les citoyens suisses se prononceront sur l’extension de la norme pénale antiraciste. La discrimination en raison de l’orientation sexuelle serait alors aussi interdite par cette norme. Un référendum a été lancé contre cette modification du Code pénal et du Code pénal militaire.
(Video: Keystone)
Le militant précise néanmoins que la situation en Suisse ne peut être comparée à ce qui s'était passé en France lors des manifestations contre le mariage pour tous.
Plusieurs jours pour s'en remettre
Eric, bénévole pour la campagne, participe régulièrement à des distributions de flyers. Dans ce cadre, il a eu à subir plus d'une fois "des remarques indélicates, homophobes et des raccourcis". Il a également été victime, une fois, de violentes insultes de la part d'un passant qui, une fois au courant du sujet de son flyer, s'en est pris verbalement à lui dans la rue. "Il vociférait contre moi, raconte Eric, ne voulait plus s'arrêter. Heureusement, des passants sont intervenus, lui ont demandé d'arrêter et m'ont soutenu." Le trentenaire raconte avoir été sous le choc, sidéré."Il m'a fallu plusieurs jours pour digérer."