Différend fiscal L'achat de CD n'est pas une solution
Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, se distancie de l'achat de CD de données bancaires suisses par d'autres pays.

Wolfgang Schäuble a réagi à l'achat par un land allemand d'un nouveau CD concernant des comptes en Suisse.
Les acquisitions hasardeuses de CD de données bancaires ne peuvent être qu'une aide d'urgence, mais n'offrent pas une solution pour résoudre de manière satisfaisante les problèmes de fiscalité. Le ministre a exprimé cette position dans le journal «Bild» de lundi, après les révélations publiées ce week-end sur l'achat par le land allemand de Rhénanie-du-Nord-Westphalie d'un nouveau CD concernant des comptes en Suisse.
«Il serait plus juste et plus simple d'avoir une procédure standardisée» pour faire face au problème de l'évasion fiscale vers la Suisse, a renchéri le porte-parole du ministère des finances Martin Kotthaus lors d'une conférence de presse. «C'est ce que permet l'accord fiscal signé avec la Suisse» au printemps, a-t-il indiqué.
Cet accord doit encore être ratifié, mais cette étape bute sur l'opposition des Etats régionaux allemands contrôlés par l'opposition social-démocrate, dont la Rhénanie du Nord-Westphalie. Les puissants Länder jugent le texte trop clément avec les fraudeurs et les banques suisses.
Il prévoit qu'à partir du 1er janvier 2013 les gains de capital réalisés par des contribuables allemands en Suisse seront soumis au même taux qu'en Allemagne. La taxe sera prélevée par les banques suisses, préservant leur anonymat. Un règlement des fraudes passées est également prévu sous forme d'un paiement forfaitaire des banques helvétiques.
«Optimiste» pour la ratification
Le porte-parole du ministère des finances s'est dit «optimiste» quant à la ratification et a fait valoir que tout retard voyait «des sommes considérables» échapper au fisc à cause de la prescription. Il a reconnu toutefois que l'achat du CD «ne rendait pas les choses plus faciles». Le secrétaire d'Etat allemand aux finances Steffen Kampeter a quant à lui sévèrement critiqué le gouvernement de Rhénanie du Nord- Westphalie.
«J'attends que le Land ne mène aucune double stratégie», a-t-il déclaré lundi au quotidien «Neue Westfälische». Ce Land ne peut bloquer l'accord fiscal au Bundesrat, la chambre des Länder au Parlement allemand, et figurer comme Robin des Bois des contribuables, selon lui. Pour le secrétaire d'Etat, l'achat de CD «n'est pas un principe juridique durable».
Le ministre des finances du Land de Rhénanie du Nord-Westphalie, Norbert Walter-Borjans, a indiqué pour sa part que les données de clients du CD sont nécessaires pour retrouver la trace des fraudeurs du fisc. Le politicien SPD a précisé à «Bild» que son Land ne pouvait pas approuver dans ces conditions l'accord fiscal avec la Suisse.
1000 clients allemands
D'après la presse allemande, le gouvernement de Rhénanie du Nord- Westphalie aurait déboursé 3,5 millions d'euros (4,2 millions de francs) pour le disque. Il concerne des données de clients de la succursale zurichoise de la banque privée Coutts, elle-même filiale de la Royal Bank of Scotland et contiendrait les noms et des informations concernant quelque 1000 Allemands.
Selon l'accord, dit Rubik, conclu entre la Suisse et l'Allemagne et avalisé en juin par les Chambres fédérales, Berlin se serait uniquement engagé à ne pas chercher activement à acquérir des données dérobées dans les banques helvétiques.
Ce scénario ne suffirait pas à empêcher le recours aux CD volés, estimaient certains experts en avril. Le Secrétariat d'Etat aux questions financières internationales avait lui indiqué que l'achat d'un CD était un geste «actif». L'opération «a été pour l'essentiel motivée et gérée» par le Land, a précisé M. Kotthaus.
(ats)
Divergences sur l'autorisation ou non d'acheter des CD de données
En signant l'accord fiscal en septembre 2011, Berlin et Berne se sont engagés à ne pas acheter de CD de données bancaires volées, estime la Suisse. Selon la Confédération, cet engagement est déjà contraignant avant la ratification.
Souvent, les traités internationaux ne deviennent définitivement contraignants qu'après ratification par les Parlements respectifs. Mais selon la convention de Vienne, qui fixe les règles sur les accords entre Etats, les partenaires signataires doivent déjà avant la ratification éviter tout acte allant à l'encontre de l'objectif de l'accord.
Cet élément plaiderait contre l'achat du CD par le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie. Mais au ministère allemand des finances, on ne l'entend pas de cette oreille. Lors de la signature de l'accord, l'Allemagne a fait une déclaration séparée selon laquelle elle se serait uniquement engagée à «ne pas chercher activement à acquérir des données dérobées dans les banques helvétiques».
A Berlin, on interprète l'expression «chercher activement» comme le fait que l'Etat allemand ne s'active pas de lui-même pour obtenir des données. En revanche, si les autorités financières se voient remettre des données, elles ont le devoir légal de les examiner, a dit un porte-parole du ministère à l'agence de presse allemande dpa. De surcroît, l'accord n'interdit ni de réceptionner des données ni de rémunérer les informateurs.