Négociations: «L'Europe ne peut éviter la Suisse pour la fiscalié»

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Négociations«L'Europe ne peut éviter la Suisse pour la fiscalié»

Le dialogue entre Berne et Bruxelles connaît quelques tensions, mais les données restent les mêmes.

Doris Leuthard et Herman Van Rompuy cherchent un terrain d'entente.

Doris Leuthard et Herman Van Rompuy cherchent un terrain d'entente.

La mauvaise humeur sur la voie bilatérale avec la Suisse et la demande de reprise automatique de l'acquis communautaire augmente à Bruxelles, mais cette situation n'est pas nouvelle.

La volonté et les possibilités de mettre Berne sous pression restent toutefois limitées, selon les experts.

Les déclarations musclées ne manquent pas - la dernière émanant du président du Conseil européen Herman Van Rompuy. Le Conseil fédéral rétorque qu'une reprise automatique de l'acquis communautaire n'est pas possible pour des raisons de souveraineté.

Berne et Bruxelles sont conscients que toute limitation de droits démocratiques n'aurait aucune chance en votation populaire parce que de sérieux désavantages menaceraient la Suisse.

Commerce et libre-circulation

Selon des experts, l'UE a ni la possibilité ni un intérêt sérieux à mettre en place une menace crédible - comme celle de dénoncer les accords bilatéraux existants. Un tel scénario est «improbable», a dit à l'ATS la spécialiste du droit européen Christa Tobler, chercheuse aux universités de Bâle et de Leiden, aux Pays-Bas.

L'UE ne pourrait se le permettre, notamment pour des raisons commerciales et de la libre-circulation. Elle n'aurait également aucun intérêt à isoler la Suisse et à la laisser devenir une région «offshore» au coeur de l'UE, selon Mme Tobler.

L'experte croit aussi peu que l'UE n'entame des négociations sur de nouveaux accords pour mettre la pression sur la Suisse. L'UE «ne peut éviter la Suisse sur des thèmes comme la fiscalité ou le transfert d'électricité», estime-t-elle.

Bloquer les négociations en cours

Le politologue à l'Université de Genève René Schwok dit ne pas avoir non plus d'indication sur une possible dénonciation des accords bilatéraux. «Je ne crois pas non plus que le blocage de prochaines négociations soit réaliste», a-t-il dit.

Comme Mme Tobler, il juge plus probable le report des discussions en cours. Un tel scénario pourrait toucher la Suisse. Plus son intérêt à une conclusion rapide serait grand, plus elle serait atteinte.

Ce serait notamment le cas pour la directive européenne sur les produits chimiques REACH qui est d'un intérêt vital essentiellement pour les petites et moyennes entreprises dans le domaine de la chimie. La situation est en revanche différente en ce qui concerne les discussions sur un accord de libre-échange agricole - une question de toute façon difficile en politique intérieure.

De son côté, l'UE a elle aussi des intérêts à des progrès rapides dans un certain nombre de dossiers, par exemple le transit de l'électricité ou le système de navigation Galileo.

Groupe de travail

Pour cette raison, les relations entre la Suisse et l'UE vont encore se développer à l'avenir, a dit Mme Tobler. La mise en place d'un groupe de travail commun visant à trouver de nouvelles solutions aux relations entre Berne et Bruxelles confirme son analyse.

Selon les connaisseurs des dossiers bilatéraux à Bruxelles, l'UE n'a par ailleurs pas vraiment suffisamment de cartes en main pour mettre la pression sur la Suisse. Mais, précisent-ils, sur le long terme, la Suisse a davantage besoin de l'UE sur le long terme que l'inverse.

Pas de pression

Jusqu'ici, aucune tentative de pression consistante n'a eu lieu. Contrairement aux années 1990, il n'y a actuellement presque aucune tension entre Berne et Bruxelles.

«Les déclarations lors de la visite de Mme Leuthard à Bruxelles étaient tout simplement amicales», affirme M. Schwok. Au contraire de certains Etats membres, la Commission européenne n'a aucune volonté politique de provoquer des dommages à la Suisse ou de la punir.

L'ambassadeur Michael Reiterer, chef de la délégation de l'UE à Berne, n'a pas souhaité s'exprimer sur cette question. Son porte- parole Stephan Libiszewski a renvoyé au groupe de travail. «Nous verrons ensuite», a-t-il dit. Les propositions existantes vont d'un accord-cadre à la revalorisation des comités mixtes.

Selon M. Schwok, ce processus aboutira à un compromis permettant aux deux parties de sauver la face. «Il est important que la solution soit tellement compliquée que personne ne la comprenne», a-t-il dit avec un clin d'oeil. Les deux parties pourront ensuite vendre le résultat comme un succès.

(ats)

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