FranceLaits contaminés: l'Etat réclame des comptes
Plusieurs grands distributeurs ont révélé chacun à leur tour avoir vendu des produits issus de lots rappelés.
Le gouvernement français a exigé jeudi des explications sur la commercialisation par plusieurs distributeurs de produits Lactalis qui auraient dû être retirés de la vente à la suite d'une contamination à la salmonelle. Il dénonce un «dysfonctionnement majeur» et une «entreprise défaillante».
Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a convoqué les représentants de la grande distribution à Bercy jeudi en fin de journée, et la direction de Lactalis vendredi. Ces convocations ont été lancées sur ordre de l'Elysée, a déclaré depuis un mini-sommet européen à Rome Emmanuel Macron, qui a averti que «si des sanctions doivent être prises, elles seront prises».
Lactalis renouvelle ses excuses aux parents
«L'Etat s'est (...) substitué à une entreprise défaillante dont je rappelle qu'elle est la seule responsable de la qualité et de la sécurité des produits mis sur le marché», a-t-il dénoncé lors d'un point de presse.
Il a ainsi rappelé avoir dû signer lui-même le 9 décembre un arrêté demandant la suspension de la commercialisation des laits infantiles et le rappel de quelque 600 lots, soit 11'000 tonnes.
Il a également annoncé 2500 contrôles supplémentaires «dès la semaine prochaine» par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Cette autorité dépend de Bercy et supervise notamment le rappel et le retrait de produits.
Lactalis a pour sa part renouvelé «ses excuses aux parents» qui ont acheté du lait susceptible d'être contaminé, a dit son porte-parole Michel Nalet lors d'un point-presse. Le groupe a assuré travailler «en parfaite collaboration» avec l'Etat depuis le début de l'affaire, en dépit des critiques du gouvernement.
«Comportements inacceptables»
E. Leclerc a été le premier à annoncer mardi qu'en dépit du rappel lancé en décembre à la suite de la découverte d'une contamination aux salmonelles dans l'usine Lactalis de Craon, 984 produits concernés avaient été vendus dans plusieurs de ses magasins.
Plusieurs grands distributeurs ont ensuite révélé chacun à leur tour avoir vendu des produits issus de lots rappelés: 434 bouteilles de lait infantile et de préparations à base de céréales pour Carrefour, 384 boîtes de lait pour Système U et 52 pour Auchan, 363 articles pour le groupe Casino (Casino, Géant, Franprix).
Lors des 2500 contrôles déjà réalisés depuis le 26 décembre par la DGCCRF dans des supermarchés mais aussi d'autres établissements comme des crèches ou des hôpitaux, «91 détenaient des boîtes de lait infantile Lactalis qui auraient dû être retirées», a précisé jeudi Bruno Le Maire. «Cette affaire est grave, elle a donné lieu à des comportements inacceptables qui devront être sanctionnés.»
Enquêtes
«C'est un dysfonctionnement majeur dans la procédure de retrait/rappel par les opérateurs, dont c'est la responsabilité», a également déclaré le ministre de l'agriculture Stéphane Travert. Il a appelé les opérateurs à faire «toute la lumière sur les défaillances».
«D'abord il y a une enquête pénale qui a été déclenchée et qui doit permettre de voir quelles sont les responsabilités précises de chacun et avoir des sanctions», a aussi indiqué sur FranceInfo Christophe Castaner, délégué général de La République en marche. «Et ensuite il faut très clairement mettre tous les opérateurs autour de la table», a-t-il ajouté.
«Il y a eu d'abord une défaillance de l'entreprise, de la grande distribution, il y a eu aussi peut-être une défaillance de l'Etat», a jugé de son côté sur RTL l'ex-candidat socialiste à la présidentielle, Benoît Hamon, déplorant une réduction des effectifs de la DGCCRF.
Production arrêtée
Deux députés, Geoffroy Didier, secrétaire général délégué des Républicains (LR), et Clémentine Autain (LFI), ont réclamé par ailleurs la création d'une commission d'enquête parlementaire.
Le 21 décembre, Lactalis a procédé au rappel de l'ensemble des laits et autres produits infantiles élaborés dans son usine de Craon depuis février 2017, après la découverte d'une contamination aux salmonelles. La production a été arrêtée sur le site, dont 250 des 327 salariés sont en chômage partiel au moins jusqu'au 4 février, a indiqué le groupe jeudi.
Au 9 janvier, Santé publique France a recensé 35 nourrissons atteints de salmonellose et ayant consommé un lait ou un produit d'alimentation infantile de cette usine. Dix-huit nourrissons ont été hospitalisés, mais tous sont sortis de l'hôpital, selon la même source. (nxp/ats)