Centre d'appels: Le Covid-19 remet en cause les délocalisations

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Centre d'appelsLe Covid-19 remet en cause les délocalisations

En Inde et aux Philippines, certains employés de centres d'appels de grandes sociétés étrangères doivent vivre H24 au bureau, le télétravail n'étant pas envisageable.

Les call-centers indiens risquent de faire les frais des relocalisations, voire d'être remplacés par des robots qui répondront aux clients.

Les call-centers indiens risquent de faire les frais des relocalisations, voire d'être remplacés par des robots qui répondront aux clients.

Keystone/photo prétexte

À Bangalore comme à Manille, la pandémie de coronavirus paralyse le fonctionnement des services délocalisés, poussant les grandes entreprises dont ils dépendent à «relocaliser» des emplois ou accélérer le passage à l'automatisation. Avec les confinements en vigueur en Inde et aux Philippines, les restrictions engendrent un cauchemar logistique pour les centres d'appels et autres services d'appui («back-office»), délocalisés dans ces pays par des entreprises internationales en raison du coût moindre de la main-d'oeuvre locale.

Mais, à cause des règles strictes régissant l'accès aux données confidentielles – comme des données bancaires – de clients habitant à l'autre bout du monde, les équipes de ces services délocalisés peuvent difficilement travailler à la maison.

Confinés au bureau

Et de nombreux employés philippins ou indiens vivent dans des logements surpeuplés avec une mauvaise connexion internet. Certaines entreprises n'ont même pas les moyens de fournir à leurs salariés l'équipement pour travailler à domicile, comme des ordinateurs portables.

Soucieuses de rester opérationnelles, certaines sociétés ont donc choisi d'avoir des employés vivant sur leur lieu de travail. Mais ces pratiques s'attirent de vives critiques de syndicats, qui ont reçu des informations de certains employés «en quarantaine de fait et enfermés dans leurs bureaux», a indiqué Mylene Cabalona, présidente du Business Process Outsourcing Industry Employees' Network (BIEN).

Conditions «inhumaines»

Début avril, le «Financial Times» a publié des photos montrant selon lui des employés dormant sur le sol d'un centre d'appels aux Philippines, vivant dans ce que le journal décrit comme des conditions «inhumaines».

Alors que certaines grandes sociétés qui s'appuient sur un de ces centres d'appels délocalisés demandent aux consommateurs de ne plus contacter leur service client, d'autres ont d'ores et déjà annoncé qu'elle prévoient de recruter des centaines de personnes dans leur pays d'origine, où elles pourraient mieux s'adapter à la situation.

Robotisation accélérée par la pandémie

Mais à plus long terme, la pandémie de coronavirus risque aussi d'accélérer le passage à l'automatisation pour ce type de services, qui verra l'intelligence artificielle effectuer des tâches aujourd'hui dévolues à des hommes et femmes, estiment les experts.

«L'intelligence artificielle ne se met pas en grève, elle peut travailler 24 heures sur 24, sept jours sur sept, et pose moins de problèmes», explique Michael Czinkota, professeur de commerce international à l'université Georgetown de Washington.

L'impact économique sera violent

«Le Covid-19 a accompli en six à huit semaines ce que les apôtres de l'automatisation n'avaient pas réussi à faire (...) en plus de cinq ans», déclare à l'AFP Ilan Oshri, professeur à l'école de management de l'université d'Auckland. La «relocalisation» d'emplois et un usage accru de l'intelligence artificielle auront un impact économique majeur pour des pays comme l'Inde ou les Philippines. Les services délocalisés y font vivre des millions de personnes et génèrent des dizaines de milliards de dollars de revenus.

(afp)

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