Surpopulation carcéraleLe MCG veut envoyer l'armée à Champ-Dollon
Pour soutenir le personnel de l'établissement pénitentiaire, le Mouvement citoyen genevois (MCG) veut que Berne envoie des militaires en renfort.
- par
- dti/tpi
La situation au sein de la maison d'arrêt genevoise de Champ-Dollon est tous les jours un peu plus tendue, à cause d'une surpopulation chronique qui devient toujours plus difficile à gérer. Pour preuve, la semaine dernière, trois détenus ont tenté de s'évader. Les gardiens ont pu les en empêcher, mais cinq geôliers ont été blessés dans la bagarre qui s'en est suivie.
Fort de ce constat, le Mouvement citoyen genevois demande l'intervention en urgence de l'armée suisse pour sécuriser le périmètre de la prison. Dans une résolution qui sera déposée ce vendredi au Grand Conseil, le parti invite l'exécutif genevois à «requérir auprès du Conseil fédéral l'assistance de l'Armée pour renforcer la sécurité dans l'enceinte de la Prison de Champ-Dollon, pour une période de six mois renouvelable.»
Le MCG s'appuie sur les principes relatifs aux engagements subsidiaires de sûreté de l'armée pour motiver sa requête. Il espère ainsi que des soldats en cours de répétition pourront être envoyés à Genève, pour «assurer notamment la surveillance périphérique de l'enceinte».
«Le priorité c'est réduire le nombre de détenus»
Du côté des gardiens, on reste dubitatif. «Personnellement je ne pense pas que ce soit la solution miracle», lâche Éric Schmid, président de la section prison du syndicat des gendarmes UPCP. «Je ne pense pas que les tensions au sein de la prison baisseraient avec l'apport de l'armée», estime-t-il. «On aurait peut-être moins à courir, mais le problème c'est la place et c'est là-dessus qu'il faut travailler. On peut tourner le calcul dans tous les sens, la seule solution c'est réduire le nombre des prisonniers.»
Et s'il écarte la possible intervention de l'armée, Eric Schmid n'en appelle pas moins à une révision du système. «On a l'impression que certains attendent la catastrophe avant de bouger. On se bat pour que ça n'arrive pas, mais à un moment il faut taper du poing sur la table.» Et le geôlier d'annoncer une montée au créneau du syndicat en septembre si rien ne bouge d'ici-là.
Les députés pas emballés
Au niveau politique, les députés qui seront appelés à se prononcer sur le projet du MCG restent prudents. Pour le libéral Olivier Jornot, «La situation de Champ-Dollon est extrêmement préoccupante, mais avant tout par manque de places de détention plus que par manque de personnel. Si un nouveau lieu de détention était disponible et que du personnel manquait, on pourrait provisoirement demander l'appui de la Confédération, comme on l'a fait par le passé pour la garde des ambassades. Le cas échéant, en aucun cas il ne faudrait faire appel, pour des activités entraînant un risque de contact avec des détenus, à des troupes en cours de répétition, seuls des spécialistes de la sécurité militaire entrant alors en ligne de compte. La proposition du MCG n'a donc rien de scandaleux, mais elle ne résout strictement rien non plus».
Chez les écologistes, on se montre plus tranché. «Les militaires sont là pour défendre un pays, pas pour être des gardiens de prison», s'exclame le député vert Christian Bavarel. «L'armée n'est pas formée pour gérer ce genre de situation. Et Je rappelle que le Grand Conseil a voté un crédit pour ces problèmes de surpopulation carcérale, c'est maintenant à l'exécutif d'agir. Maintenant, c'est sûr que c'est un problème crucial mais que nous ne pourrons le résoudre à coup de baguette magique.»
Même son de cloche enfin du côté parti radical. «Les gesticulations du MCG ne vont rien changer», assène Michel Ducret. «L'idée d'engager des militaires est bien gentille mais on ne va pas réinventer la roue. Dans les établissements pénitentiaires de la plaine de l'Orbe, on a fait appel à des Sécuritas ou des polices privées pour certaines tâches de surveillance. On pourrait très bien en faire de même ici. Enfin de manière générale, le problème est d'abord celui de la surpopulation. On pourrait très bien fabriquer très vite des baraquements provisoires pour les détenus les moins dangereux. Mais personne ne se mouille.»
À noter encore que la conseillère d'État en charge de la sécurité et de la police, Isabel Rochat, reste pour le moment injoignable.