KosovoLégislatives: fragile avance pour les «guerriers»
Les législatives de dimanche pourraient augurer d'une période d'incertitude au Kosovo, le parti en tête n'atteignant pas forcément une majorité solide.

Ramush Haradinaj, leader de la «coalition des guerriers», s'est félicité d'une «victoire convaincante».
Les partis radicaux sont arrivés en tête des élections législatives de dimanche au Kosovo. Mais ils risquent de ne pas s'assurer une majorité solide, augurant peut-être d'une période d'incertitude pour le pays.
Peu après 23h00 et après dépouillement de près de 90% des bulletins, l'ONG indépendante Democracy in Action annonçait que la «coalition des guerriers» emportait un tiers des voix (33,1%). Cette dernière était réunie derrière le Parti démocratique du Kosovo (PDK) du président Hashim Thaçi.
Les deux autres principaux partis, Vetevendosje (Gauche nationaliste) et la Ligue démocratique du Kosovo (LDK, centre droit) suivaient dans un mouchoir de poche, avec respectivement 26,6% et 25,3%.
Prudence
«Nous appelons les partis à ne pas faire la fête trop tôt», a mis en garde en début de soirée Ismet Kryeziu de «Democracy in Action», au moment où des estrades étaient dressées à Pristina par le PDK et Verevendosje. Mais le chef de la «coalition des guerriers», Ramush Haradinaj, s'est félicité d'une «victoire convaincante» et a annoncé qu'il allait s'employer à former un gouvernement.
La répartition des sièges ne devrait être annoncée que lundi, voire en milieu de semaine. Mais il est loin d'être acquis que Ramush Haradinaj atteigne les 51 sièges (120) qui, avec l'appui des dix élus des minorités non serbes (roms, bosniaques, turcs,...), lui permettraient de former un gouvernement. Les 100 à 150'000 Serbes désignent aussi dix députés.
Inculpations à haut risque
Ces résultats annoncent de délicates tractations qui pourraient accoucher d'une majorité fragile au moment où le Kosovo est confronté à d'importants défis: situation économique catastrophique qui pousse une grande partie de sa jeunesse à l'exode, relations au plus bas avec la Serbie, qui refuse toujours de reconnaître l'indépendance proclamée en 2008 par son ancienne province albanaise.
Il lui faudra aussi gérer la possible inculpation de plusieurs hauts responsables du pays, par les nouvelles cours spéciales chargées de juger des crimes de guerre commis par l'Armée de libération du Kosovo (UCK). Parmi les noms régulièrement cités, figure celui du président Thaçi, aux affaires depuis 2006.
Quand arriveront les premières arrestations, prédisait avant le scrutin l'European Centre for minority issues (ECMI), il y aura un «véritable risque d'instabilité» et de chute du gouvernement.
Accord difficile
Ultime guerre ethnique en ex-Yougoslavie, ce conflit entre indépendantistes et forces de Belgrade avait fait 13'000 morts entre 1998 et 1999, dont 10'000 Kosovars albanais. Le PDK et ses alliés pourraient se trouver à la merci d'un accord de gouvernement entre la LDK et Vetevendosje. Mais ces deux partis ne semblent guère partager que leur rejet des «guerriers», ayant des positions notamment très différentes sur le dialogue avec la Serbie.
Candidat de la LDK, Avdullah Hoti, entend le poursuivre, tandis que le chef charismatique de Vetevendosje, Albin Kurti, s'oppose à l'accord de normalisation conclu en 2013 avec Belgrade.
Sur ce point, il semble plus proche de l'ancien rebelle Ramush Haradinaj, alias «Rambo», considéré comme un criminel de guerre par la Serbie qu'il dépeint comme une «ennemie».
«Guerre à la corruption»
Parti prônant l'action de rue, et dont les députés jetaient du gaz lacrymogène au parlement pour s'opposer à l'adoption d'une loi qui leur déplaisait, Vetevendosje (Autodétermination) double son score de 2014.
Son discours alliant thématiques économiques de gauche, combat contre la corruption et rhétorique nationaliste, semble avoir répondu au ras-le-bol d'une grande partie de l'électorat de ce pays d'1,8 million d'habitants. Le chômage dans le pays flirte officiellement avec les 30%.
Si le sujet est un thème traditionnel de Vetevendosje, Avdullah Hoti a également promis «une guerre sans compromis à la corruption», un fléau. «Après 17 ans au pouvoir», les institutions «se caractérisent désormais par le crime, la corruption et le népotisme», accuse dans un rapport le centre slovène de réflexion spécialisé dans les Balkans IFIMES.
Si ce problème n'est pas réglé, les Kosovars «attendront en vain l'abolition du régime des visas pour les Etats de l'Union européenne», prédit IFIMES. Un sujet crucial dans un pays où un habitant sur deux a moins de 30 ans. Beaucoup rêvent d'imiter les 400'000 Kosovars déjà exilés. (nxp/afp)