Brigandage de Chavornay (VD)«Les malfaiteurs chevronnés jouent sur la frontière»
A Lyon, au procès des auteurs présumés de l’attaque d’un convoyeur de fonds en 2018 dans le canton de Vaud, l’avocat général a regretté les entraves à la collaboration franco-suisse.
- par
- Richard Schittly

Le grand banditisme lyonnais s’en était pris à un fourgon blindé de la société SOS Surveillance.
Un dossier morcelé, pas à la hauteur de l’enjeu. En manque de coopération franco-suisse aussi. Eric Mazaud n’a pas laissé sa langue dans sa robe rouge de haut magistrat, ce mardi, devant la cour d’assises de Lyon. Trois hommes y sont jugés pour le brigandage de Chavornay (VD) perpétré en février 2018, alors que l’équipe à l’origine de l’attaque du fourgon blindé et de la séquestration de la fille du conducteur a compté au moins six auteurs directs, et au moins quatre complices indirects.
L’avocat général de la cour d’appel a ouvertement regretté l’absence de deux complices, récemment condamnés par Tribunal criminel du canton de Vaud. Ils ont usé du droit suisse de ne pas venir témoigner au procès de Lyon. «La frontière nous empêche de les avoir à cette audience, c’est absolument incroyable si on y pense» a déploré Eric Mazaud, regrettant «l’exigence procédurale beaucoup plus rigide» appliquée en Suisse. Ni déposition, ni visioconférence: le procès en devient «tronqué», selon l’avocat général.
Les malfaiteurs «jouent sur la frontière»
«Il y a un effet frontière. On joue sur la frontière quand on est un malfaiteur chevronné. On espère qu’elle pourra distraire les services de sécurité, et on espère une mésentente entre les services d’enquête», a déclaré ce spécialiste de longue date de la criminalité organisée. Pour lui, la frontière complique encore trop le cours de la justice, alors que le banditisme lyonnais est «à portée de parkings». «Autant elle est facile à franchir, autant elle reste ce qu’elle est pour les services, elle existe bien, elle est une source d’entrave dans ce procès par exemple», a estimé le magistrat, regrettant: «Les frontières le sont beaucoup pour la justice, elles le sont assez peu pour les malfaiteurs.»
Du receleur au cerveau: 6 à 20 ans requis
L’avocat général a requis une peine de 20 ans de réclusion criminelle contre Medhi A, décrit comme «le personnage évidemment central» de l’affaire de Chavornay. Absent,
possiblement détenu en Tunisie, le braqueur lyonnais s’est rendu 18 fois à Genève durant l’année qui a précédé le brigandage, a souligné l’accusation. Le magistrat a requis douze ans de réclusion criminelle contre Yusuf K, convoyeur, «complice essentiel». Le ministère public a réclamé 6 et 7 ans d’emprisonnement contre deux complices accusés de repérages et de recel d’une partie du butin.