France: Les mineurs regardent du porno de manière massive et précoce

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FranceLes mineurs consomment du porno de manière massive et précoce

En France, près d’un tiers des jeunes utilisateurs d’internet consultent chaque mois au moins un site porno, surtout sur leur smartphone. Des associations parlent de données «effrayantes».

En France, 2,3 millions de mineurs visionnent plus de 50 minutes de contenu pornographique par mois.

En France, 2,3 millions de mineurs visionnent plus de 50 minutes de contenu pornographique par mois.

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En France, en moyenne, 2,3 millions de mineurs visionnent plus de 50 minutes de contenu pornographique par mois. Les trois quarts utilisent exclusivement leur téléphone, donc hors du regard parental, selon une étude réalisée en 2022 auprès de 25’000 personnes et commandée par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom).

Le phénomène s’aggrave, et «ces mineurs sont encore plus jeunes que ce qu’on pensait», alerte Laurence Pécaut-Rivolier, de l’Arcom: 21% des garçons de 10-11 ans regardent des sites pornos chaque mois, et 51% des garçons de 12-13 ans (mais 31% des filles du même âge).

Violence envers les femmes banalisée

Ces «chiffres effrayants» montrent «l’urgence à agir», réagit le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, car les contenus pornos font «le lit d’une société qui banalise la violence envers les femmes et participent à la hausse des violences sexistes et sexuelles». «Qu’attendons-nous pour nous attaquer à ce problème de santé publique?» a demandé l’association Osez le féminisme! «Nous exigeons que le gouvernement fasse enfin appliquer la loi.»

Celui-ci a justement présenté, le 10 mai, un projet de loi visant à «sécuriser et réguler» internet. Ce texte confie à l’Arcom le pouvoir de bloquer et déréférencer les sites pornos qui ne respectent pas la loi. Car si les sites sont en principe tenus de réserver leur accès aux seuls adultes, dans les faits, la plupart se contentent de demander aux internautes de cliquer sur une case pour certifier qu’ils ont plus de 18 ans.

Saisie par des associations, l’Arcom a mis en demeure quinze sites pour qu’ils instaurent un vrai contrôle d’âge, et a saisi la justice pour obtenir le blocage de sept d’entre eux, dont Pornhub. Le Tribunal judiciaire de Paris doit se prononcer sur ce dossier le 7 juillet.

Les gérants refusent la vérification d’âge

Lors d’une audience, en avril, les gérants des sites ont refusé de mettre en place une vérification d’âge, car ils jugent la loi insuffisamment claire sur les modalités techniques attendues. L’une des solutions consisterait à créer un système de vérification dit de «double anonymat», par lequel l’internaute donnerait son identité à un «tiers de confiance», explique Thomas Rohmer, fondateur de l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique.

Ce dispositif débloquerait ensuite l’accès aux contenus, sans pour autant transmettre de données personnelles aux sites pornographiques. «Cela peut être complexe à mettre en œuvre, mais en attendant, soyons pragmatiques: on peut imposer aux sites de demander la carte bancaire de l’utilisateur», suggère Thomas Rohmer.

Cette question, a-t-il observé, relève aussi de la responsabilité des parents, qui doivent s’intéresser de près à ce que font leurs enfants sur internet, et aider les adolescents à «déconstruire les images» visionnées.

Images pour adultes accessibles en trois clics

Quant aux enfants plus jeunes, qui «sortent de l’école primaire», ils «n’ont pas la maturité pour voir ces images, conçues pour des adultes», souligne le psychologue Samuel Comblez. «Certains sites montrent des images scatophiles, zoophiles, font la promotion de l’inceste, des images agressives vis-à-vis des femmes. Et tout cela est aujourd’hui accessible en trois clics.»

Augmentation chez les jeunes suisses

En Suisse, expliquait, début mai, le site rts.ch, la pornographie sur internet est de plus en plus regardée et partagée par des mineurs. Ce qui a poussé la Prévention suisse de la criminalité à lancer une campagne de sensibilisation et d’information (pas-ok.ch). Une vidéo vise à dissuader enfants et adolescents de «consommer et de diffuser de la pornographie sur internet». Cité par rts.ch, Fabian Ilg, directeur de la PSC, explique que «ces dernières années, en Suisse, les cas de pornographie impliquant des mineurs ont augmenté. La moitié des délits pornographiques sont commis par des mineurs. Ces derniers y accèdent en majorité via leurs smartphones». En Suisse aussi, le manque de contrôle des plateformes est critiqué: la seule barrière est un simple clic confirmant sa majorité.

En 2022, les statistiques du canton de Genève révélaient que les infractions liées à des images de pornographie chez les moins de 16 ans ont bondi de 85 pour cent.

(AFP)

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