EspagneMadrid lance la riposte au défi séparatiste catalan
Le référendum d'autodétermination n'a pas plu. La Cour constitutionnelle est intervenue jeudi.
Le porte-parole du gouvernement de Catalogne a affirmé qu'«un état de siège latent» était imposé par Madrid.
Le président du gouvernement espagnol Mariano Rajoy a dénoncé jeudi «un acte intolérable de désobéissance» en Catalogne. Les autorités y ont convoqué un référendum d'autodétermination pour le 1er octobre, déclenchant un arsenal de mesures juridiques pour le contrer.
La Cour constitutionnelle espagnole a suspendu jeudi, comme on s'y attendait, l'entrée en vigueur de la loi. M. Rajoy avait ordonné la saisine de la Cour constitutionnelle pour faire annuler les textes adoptés en Catalogne afin d'organiser ce référendum. Le principe avait déjà été déclaré anticonstitutionnel en 2014.
Il a précisé que les autorités catalanes et tous les maires de la région seraient avertis qu'il est de leur «devoir d'empêcher ou de paralyser toute initiative tendant à l'organisation du référendum». «Je suis très conscient de la gravité du moment», a insisté M. Rajoy, en appelant les indépendantistes en Catalogne à ne pas «mépriser la force de la démocratie».
Pas de référendum
«Il n'y aura pas de référendum d'autodétermination», a-t-il martelé. Il a promis de mettre en oeuvre «tout ce qui sera nécessaire» pour l'éviter. La Catalogne représente 20% du PIB espagnol.
Peu avant, le procureur général de l'Etat avait accusé les dirigeants catalans d'avoir «désobéi frontalement aux décisions de la Cour constitutionnelle» en convoquant le référendum. Il a précisé que deux procédures étaient en préparation contre la «conférence des présidents» du parlement catalan, qui a accepté de soumettre la loi au vote, et contre l'ensemble du cabinet catalan.
Le magistrat a annoncé le lancement d'enquêtes tous azimuts sur d'éventuels préparatifs du scrutin. Il a également ordonné de saisir les «instruments destinés à préparer ou tenir le référendum illégal».
République indépendante
A Barcelone, la réponse n'a pas tardé. Le porte-parole du gouvernement catalan, Jordi Turull, a dénoncé un «état de siège latent» imposé à la Catalogne. Il a promis que les séparatistes ne se laisseraient pas impressionner par la «pluie de plaintes».
Dans l'après-midi, les séparatistes, majoritaires au parlement catalan depuis septembre 2015, ont prévu d'examiner une deuxième loi. Celle-ci vise à organiser la transition vers un Etat indépendant si le «oui» l'emporte le 1er octobre. Dans ce cas, la Catalogne deviendrait selon eux une république indépendante, séparée du royaume d'Espagne.
L'exécutif catalan a accéléré les préparatifs concrets du scrutin. «Qu'il neige ou qu'il vente, nous le ferons parce que c'est notre contrat avec les citoyens de Catalogne», a déclaré Jordi Turull.
Le président du gouvernement catalan, Carles Puigdemont, a adressé un courrier aux mairies afin de dresser l'inventaire des locaux disponibles pour y installer les bureaux de vote.
Journée folle
Mercredi, le Parlement régional a vécu une journée folle autour de l'adoption de la loi organisant le référendum, marquée par les huées et les cris. Le texte a finalement été adopté par 72 députés sur 135, inspirés par le référendum organisé en Ecosse en 2014. La droite, les socialistes, le centre sont contre cette consultation interdite par la justice. Ils estiment que l'ensemble du peuple espagnol doit se prononcer quand l'unité du pays est en jeu.
Régime juridique exceptionnel
Les indépendantistes assurent, eux, défendre leurs droits après des années d'«humiliation» par les conservateurs. Ceux-ci avaient notamment obtenu en 2010 de la Cour constitutionnelle qu'elle réduise les compétences plus larges accordées à la région en 2006 par le Parlement espagnol.
Dans la loi adoptée mercredi, les parlementaires séparatistes instaurent un «régime juridique exceptionnel» qui prévaut sur toutes les normes qui pourraient entrer en conflit avec ce texte. Un défi sans précédent à l'autorité de Madrid.
Face à eux, le gouvernement espagnol privilégie l'utilisation d'un arsenal juridique mis en place en prévision de cette situation. Il peut aller jusqu'à une suspension des dirigeants catalans ordonnée par la Cour constitutionnelle et la saisine du patrimoine personnel de responsables. (nxp/ats)