Schaffhouse: Mis à l'amende pour avoir dit «Allahu Akbar»

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SchaffhouseMis à l'amende pour avoir dit «Allahu Akbar»

Un jeune homme a reçu une prune de 150 francs pour avoir salué son ami dans la rue en utilisant les mots «Allahu Akbar». Il estime être victime de discrimination.

M. Djurdjevic/ofu
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Orhan E. a utilisé les mots «Allahu akbar» pour saluer un ami, en mai dernier à Schaffhouse. Cette formulation lui a valu une amende de 150 francs pour scandale sur la voie publique.

Orhan E. a utilisé les mots «Allahu akbar» pour saluer un ami, en mai dernier à Schaffhouse. Cette formulation lui a valu une amende de 150 francs pour scandale sur la voie publique.

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Le jeune homme de 22 ans a fini par payer la prune pour ne pas avoir davantage d'ennuis. Mais il estime être victime de discrimination.

Le jeune homme de 22 ans a fini par payer la prune pour ne pas avoir davantage d'ennuis. Mais il estime être victime de discrimination.

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Il rappelle que ces mots sont couramment utilisé par les musulmans et cela dans toutes sortes de situations.

Il rappelle que ces mots sont couramment utilisé par les musulmans et cela dans toutes sortes de situations.

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Deux mots qui pèsent lourd sur le porte-monnaie. En août dernier, Orhan E. a reçu une amende de 150 francs de la police municipale de Schaffhouse pour outrage public à la pudeur (articles 19 et 59 de l'ordonnance de police de la ville de Schaffhouse). Dans la lettre des forces de l'ordre, celles-ci lui reprochent d'avoir salué «haut et fort» un ami en prononçant les mots «Allahu Akbar» (Dieu est plus grand). Or le jeune Turc de 22 ans tient à préciser: «C'est une expression banale utilisée quotidiennement par les musulmans. Nous l'utilisons tout le temps sans aucune arrière-pensée», explique-t-il lundi à «20 Minuten».

Les faits remontent à mai 2018, à Schaffhouse. «Je me tenais devant l'association culturelle turque de Schaffhouse avec mon ami. On parlait en turc. Soudain, une policière m'a appelé et m'a demandé ce que je voulais dire avec cette expression.» Et d'ajouter: «Je lui ai dit que ces mots ne signifiaient rien de grave et qu'ils étaient souvent utilisés par les musulmans pour se saluer. L'expression est aussi employée pour mettre l'accent sur quelque chose de positif. Par exemple: «Il fait beau aujourd'hui, Allahu Akbar.»

«Ils ont exigé que je m'excuse»

Or les explications d'Orhan E. n'ont pas suffi pour convaincre l'agente, qui a appelé des renforts. «Des policiers armés ont débarqué. Ils m'ont fouillé, ont contrôlé mon identité et ont exigé que je m'excuse.»

Le jeune homme, qui a fini par payer l'amende pour ne pas avoir davantage de problèmes, estime être victime de discrimination. Pour lui, toute cette histoire a été «traumatisante». «Je suis né ici et jamais je n'aurais pensé vivre une chose pareille en Suisse.»

Une première

Simon Stocker, conseiller municipal schaffhousois chargé de la Sécurité et des Affaires sociales, comprend que la police ait réagi de manière «sensible»: «Selon le rapport de police, la situation n'a pas été évaluée comme étant une simple salutation, mais plutôt un outrage public à la pudeur.» Il rappelle par ailleurs qu'Orhan E. aurait pu s'opposer à l'amende. Pour finir, Simon Stocker tient à préciser que dire «Allahu Akbar» n'est pas interdit en soi à Schaffhouse, mais que tout dépend du contexte dans lequel l'expression est formulée. Il ajoute que c'est la première fois qu'une amende a été émise pour de telles raisons.

Une sanction critiquée

Önder Güne, porte-parole de la Fédération d'organisations islamiques de Suisse (FOIS), ne comprend pas la décision de la policière. «Les musulmans n'ont aucun problème avec cette expression. Seules les personnes non-musulmanes y voient un soucis parce qu'il la mettent en lien avec le terrorisme.» La FOIS assure qu'elle prendra prochainement contact avec la police schaffhousoise. Le conseiller national socialiste Daniel Frei critique lui aussi l'amende. «Les expressions religieuses utilisées pour se saluer font partie de la liberté religieuse et devraient pouvoir être formulées dans l'espace public sans qu'on doive risquer une amende.»

Le conseiller national UDC Andreas Glarner, lui, n'est pas de cet avis: «'Allahu Akbar' est utilisé par les terroristes peu avant qu'ils se font exploser. La policière a tout fait juste. Les forces de l'ordre de notre pays doivent tout faire pour garantir la sécurité.» Saïda Keller-Messahli, du Forum pour un islam progressiste, estime elle aussi que l'agent a bien fait d'intervenir: «L'expression a été pervertie par les attentats. Si le jeune homme a prononcé ces mots de manière assez forte, il est possible qu'il ait perturbé des personnes dans la rue.» Saïda Keller-Messahli ne souhaite en revanche pas se prononcer sur la question de savoir si l'amende est justifiée ou non.

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