Garde partagéeParents séparés, enfants isolés: «Assez de larmes ont coulé!»
Des associations ont manifesté, dimanche, pour exiger que la loi qui prévoit la généralisation de la garde alternée soit mieux appliquée.
- par
- Claudia Blumer
- Yannick Weber

Le parlement devrait préciser la loi pour favoriser les décisions de garde partagée.
Encore trop nombreux sont les enfants qui perdent le contact avec un de leurs parents après une séparation, dénonce une alliance d’associations qui a lancé dimanche à Köniz (BE), lors d’une manifestation, une campagne intitulée «Assez de larmes!» Elle demande que «la politique s’active et les autorités appliquent la loi». Parmi les participants à la campagne, des associations de défense des droits de l’enfant ou des pères.
Quelques chiffres
Ils font référence à la loi qui prévoit depuis 2014 que la garde partagée soit a priori la règle en cas de séparation des parents, plutôt que de donner l’autorité parentale à l’un des parents et un droit de visite au deuxième. Les chiffres de l’Office fédéral de la statistique (OFS), parus en 2021, montrent que la loi a eu un effet positif. L’autorité parentale conjointe était la norme après 62% des séparations avant 2014, elle est passée à 74,4% en 2018 et atteint désormais environ 80%.
Pour les associations, les cas problématique restent toutefois encore trop nombreux. «Les enfants ont besoin de leurs deux parents. Malheureusement, ce n’est souvent pas le cas dans la réalité», dénonce le texte publié sur le site internet de la campagne.
Un parent sur dix perd tout contact
Ce qui les inquiète sont les cas conflictuels qui aboutissent à ce que les juges donnent la garde à un seul des parents avec, en bout de chaîne, la perte de contact totale de l’enfant avec l’autre parent. L’OFS note qu’un parent sur dix perd tout contact après une séparation, que ce soit sous forme de visite ou même par téléphone. Selon le président de l’Association pour la coparentalité, Oliver Hunziker, il y aurait environ 20’000 enfants concernés. «C’est malsain, surtout pour l’enfant», dit la campagne «Assez de larmes!»
Yvonne Feri, présidente de la Fédération suisse des familles monoparentales, indique pour sa part que ces chiffres sont exagérés. Les données fournies par l’OFS ne permettent pas d’avoir un chiffre officiel et solide du nombre d’enfants concernés, dit-elle, estimant en outre que la pression pour ancrer dans la loi de façon plus systématique la garde partagée est contre-productive, car elle retirerait une marge de manœuvre pour tenir compte des cas individuels.
Le parlement s’active aussi
Le conseiller national Sidney Kamerzin (C/VS) a déposé une motion en 2021 pour mieux ancrer la garde partagée dans la loi. Son texte a été bien accueilli. Dernier épisode en date du long parcours législatif, la commission des affaires juridiques du Conseil des États a donné suite à sa motion à la mi-octobre par 10 voix pour et aucune contre. «La commission est convaincue que la garde alternée permet de mieux garantir le bien de l’enfant, même s’il existe des conflits entre les parents séparés», relève-t-elle. Le Tribunal fédéral a jugé en 2020 que le refus d’un des deux parents ne doit pas faire obstacle à la décision de garde alternée. C’est ce jugement qui doit être inscrit dans la loi désormais.