SnowboardPat Burgener mise tout sur le half-pipe
Le rider vaudois laisse tomber ses autres spécialités dans le but de faire partie des meilleurs freestylers du pays sur demi-tube. Il s'explique.
- par
- Oliver Dufour
A peine descendu de l'avion qui l'a ramené des Etats-Unis, où il vient d'aligner deux podiums (3e et 2e) à Copper Mountain sur le Revolution Tour, qui réunit quelques-uns des meilleurs riders nord-américains, Pat Burgener est déjà lancé à vive allure. Plusieurs rendez-vous sont déjà fixés dans la région zurichoise, avant qu'il ne retourne dans la foulée dans ses pénates vaudoises. Pas le temps de se reposer, de récupérer du décalage horaire. Vivre sous l'étiquette du snowboarder cool et détendu ne signifie pas être désœuvré ou se la couler douce à tout moment de la journée.
Il a la «tchatche», le rider vaudois, au retour de ce qu'il qualifie de «super voyage». Et il a de quoi avoir le sourire. L'année 2015 a pour lui marqué un retour au premier plan, après deux saisons fortement perturbées par des blessures. A la fin février 2014, il s'était déchiré les ligaments croisés du genou droit et avait manqué toute l'année. En avril, il a néanmoins signé son comeback d'un titre de champion national de half-pipe, avant de se blesser à nouveau lors d'une chute à l'entraînement. Une clavicule cassée qui ne l'a finalement écarté du circuit qu'un mois.
«Même Shaun White a arrêté»
«Ce n'était pas trop grave, mais forcément on se pose des questions lorsqu'on a connu des blessures plus sérieuses», admet Burgener. Désormais, ce snowboarder aux multiples facettes (il est aussi musicien; lire ci-contre) ne mise plus que sur une seule discipline: le half-pipe. Fini, donc, le slopestyle (figures sur une piste composée de divers modules). Le big air (sauts sur une grande rampe), il y renoncera au terme de cette saison. «Il y a encore quelques années, des riders concourraient dans plusieurs disciplines. Maintenant ils ont quasiment tous arrêté de le faire. Le niveau a tellement augmenté partout qu'il faut se concentrer sur une seule chose pour bien la faire. Même Shaun White (ndlr: la superstar américaine du snowboard) a connu des problèmes de blessures à cause de ça. Le half-pipe, c'est la discipline dans laquelle j'avais commencé à 15 ans», rappelle-t-il. Elle jouit d'une crédibilité et d'un vrai esprit de compétition, du fait de son couronnement olympique. Elle est passée de «loisir» à sport à part entière. Ca sera peut-être un jour le cas du slopestyle et du big air aussi, d'ici huit à douze ans. Le half-pipe a d'abord mis quelques années à évoluer. En plus, on retrouve toujours le même «pipe», alors que dans les autres disciplines la qualité du terrain de jeu peut beaucoup varier.»
C'est vrai que depuis l'introduction des figures sur un demi-tube de neige aux JO de Nagano, la taille du «pipe» a augmenté – on est passé à des rebords de 3m de haut à 6m50 – et l'amplitude et la complexité des figures n'a cessé de croître. «Mais ce qui compte avant tout, c'est la pureté d'un run (ndlr: une manche, soit un passage dans le tube en enchaînant des figures)», souligne Pat Burgener. «On atterrit sur la carre et ont doit être prêt à enchaîner la figure suivante. Voilà pourquoi il n'y aura certainement pas de 1440 (ndlr: rotation à 1440 degrés) en half-pipe lors des prochains Jeux en Corée du Sud (ndlr: à Pyeongchang en 2018), mais sans doute plus de figures lancées en «switch backside» (ndlr: rotation sur l'arrière de la planche avec son «mauvais» pied devant.)
Les Mondiaux dans la ligne de mire
Dans ce domaine, le Lausannois de 21 ans estime qu'il a de l'avance, puisqu'il était l'un des seuls, voici quelques années, à réussir le «triple cork» de cette manière sur un grand saut. «Je veux profiter de ça pour devenir l'un des deux meilleurs Suisses en half-pipe, derrière Iouri Podladtchikov, donc intégrer le top 10 mondial.» Pour ce faire, il enchaînera des épreuves de Coupe du monde à Park City et au Japon, ainsi que l'European Open de Laax (GR), début janvier, puis l'US Open et les championnats du monde à Yabuli, en Chine, son «highlight» de la saison à venir, en février et mars 2016. «Après, c'est clair que les JO sont un rêve, mais ça ne sert à rien de se projeter trop loin non plus.» A condition que la santé physique soit au rendez-vous, on imagine toutefois mal ce surdoué du snowboard manquer la lutte pour un billet olympique.
Twitter, @Oliver_Dufour
«J'espère jouer au Montreux Jazz»
Pat Burgener a d'autres cordes à son arc que le snowboard. Il en a aussi à sa guitare. Autodidacte, le Vaudois s'est récemment mis à la chanson. Deux de ses clips, tournés à Lausanne, ont déjà connu un joli succès sur le Web. «Je prévois d'en sortir un autre pendant les Fêtes», annonce-t-il. «Je vais aussi jouer deux concerts pendant l'European Open, à Laax en janvier. Un au début et un autre après les finales, où je prendrai ma guitare sur les pistes.» Un nouvelle passion qu'il s'agira toutefois de mettre en veilleuse dans la foulée, jusqu'à la fin des Mondiaux en mars. «Je serai en voyage sans arrêt entre les USA, le Japon et la Chine, ça serait compliqué d'ajouter la musique à tout ça.» Mais ça ne s'arrêtera pas là. Cet été, j'aimerais beaucoup rester en Suisse et jouer dans des festivals. J'espère jouer au Jazz, à Montreux. Je prévois de sortir mon premier album l'été ou l'hiver prochain. Et pourquoi pas une tournée européenne après les Jeux olympiques? J'en rêve, en tout cas!»