Pékin reprend le contrôle des zones de protestation tibétaines

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Pékin reprend le contrôle des zones de protestation tibétaines

L'armée et la police chinoises semblaient avoir resserré leur contrôle sur les foyers de protestation tibétains mercredi, tandis que Pékin confirmait son intention de faire passer la flamme olympique par le Mont Everest, en pleine polémique sur un éventuel boycott des JO.

Des témoignages concordants suggèrent que les autorités chinoises reprennent peu à peu le contrôle au Tibet et dans les provinces voisines, où vivent plus de la moitié des 5,4 millions de Tibétains du pays. De ville en ville, les forces de l'ordre, avec l'aide d'importants renforts, isolent les communautés, multiplient les contrôles d'identité et installent des barrages pour empêcher les Tibétains de partir et les journalistes de s'approcher.

A Lhassa, quadrillée par les forces de sécurité, la situation restait calme mercredi mais dans d'autres régions, les manifestations se poursuivaient. A Hezuo, dans la province du Gansu, des centaines de personnes ont brûlé le drapeau chinois et brandi l'emblème du Tibet indépendant aux cris de «Tibet libre» mardi. A Aba, dans la province du Sichuan, voisine du Tibet, les habitants ont reçu l'ordre de rester chez eux après un rassemblement en ville mardi.

La répression des manifestations tibétaines contre l'autorité chinoise a déjà fait au moins 80 morts, selon le gouvernement tibétain en exil. Pékin a annoncé pour sa part 16 morts et 325 blessés, ainsi que 300 bâtiments incendiés. Lancé dans le calme par des moines bouddhistes le 10 mars, à l'occasion de l'anniversaire du soulèvement de 1959 contre le régime communiste, le mouvement a pris une tournure plus violente à partir de vendredi.

D'après l'agence de presse gouvernementale Chine Nouvelle, 170 manifestants tibétains de Lhassa et des alentours se seraient présentés spontanément à la police chinoise, le régime ayant promis la clémence aux manifestants repentis.

Malgré le malaise suscité à l'étranger par cette répression, Pékin a confirmé, par la voix de Jiang Xiaoyu, vice-président du comité d'organisation des JO, sa volonté de faire passer la flamme olympique par le Tibet et l'Everest, comme prévu. A cinq mois de l'ouverture des Jeux olympiques de Pékin, les événements ont déclenché des débats sur l'éventualité de boycotter la cérémonie d'ouverture le 8 août.

Néanmoins, et après l'avoir durement critiqué mardi, le Premier ministre chinois a laissé entendre qu'il serait prêt à discuter avec le dalaï lama. Selon le Premier ministre britannique Gordon Brown, qui s'est entretenu avec Wen Jiabao par téléphone, «le Premier ministre a dit que, si le dalaï lama respectait deux choses qu'il a déjà affirmées, à savoir qu'il ne soutient pas l'indépendance totale du Tibet et qu'il renonce à la violence, il était prêt à entamer un dialogue avec le dalaï lama».

Cela n'a pas empêché le chef spirituel des Tibétains d'être de nouveau la cible d'attaques féroces. Le chef du Parti communiste du Tibet s'en est pris vivement au prix Nobel de la paix, affirmant que «le dalaï est un loup en robe de moine, un diable au visage humain mais au coeur de bête!». «Nous sommes maintenant engagés dans une féroce bataille (...) avec la clique du dalaï, une bataille à mort entre nous et l'ennemi», a lancé Zhang Qingli.

Le ministère des Affaires étrangères chinois a précisé par la suite que les déclarations rapportées par Gordon Brown ne prouvaient aucun changement dans la politique de Pékin à l'égard du dalaï lama. La Chine est prête à dialoguer avec lui s'il renonce à l'indépendance et reconnaît que le Tibet et Taïwan font partie de la Chine, a-t-il été rappelé. Or, les violences des derniers jours à Lhassa prouvent qu'il n'a pas suffisamment renoncé à l'indépendance, arguent des responsables du Parti communiste.

Depuis Dharamsala, où est installé le gouvernement tibétain en exil, le dalaï lama a demandé pour sa part aux organisateurs d'une marche de protestation contre la tutelle chinoise sur le Tibet de renoncer. Partis d'Inde, les participants devaient se rendre à Lhassa, mais le dalaï lama a dit redouter des heurts avec les forces chinoises à la frontière. Les organisateurs de la marche se sont refusés à tout commentaire dans l'immédiat et ont promis de communiquer leur décision prochainement.

Le dalaï lama avait déjà lancé un appel au calme la veille, avant de menacer de démissionner de son poste de chef du gouvernement en exil si les violences dans la région échappaient à tout contrôle. Il avait aussi laissé entendre que Pékin, pour le discréditer, pourrait être impliqué dans la détérioration de la situation. (ap)

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