Canton de VaudPoussée au suicide par son compagnon
Une femme a sauvé sa mère en train d'agoniser au téléphone. L'ami de celle-ci l'avait incitée à avaler des médicaments. Il est jugé.
- par
- Christian Humbert
«Elle crève la mamie!»: c'est ce qu'a entendu Marie*, alors âgée de 26 ans, le 14 mai 2011 au téléphone. Lise*, sa mère, venait de l'appeler après avoir avalé des médicaments pour en finir. Au bout du fil, Paul*, le compagnon de celle-ci, insultait la quinquagénaire tout en préparant un steak sur fond de musique.
Le couple se connaissait depuis 2009. L'homme, né en 1962, bénéficiait d'une rente AI: il est bipolaire. Après avoir arrêté de fumer, la femme avait pris du poids. Trop, aux yeux de son compagnon, qui la narguait en lui montrant des corps sexy à la TV. «Salope», «grosse vache» ou «crève charogne»: les insultes pleuvaient. Face au mal-être de la victime, le prévenu lui répétait qu'elle pouvait aller «se foutre en bas d'un pont».
Le jour du drame, à bout de nerfs, Lise a choisi les médicaments et en a ingurgités. Pas assez au goût de Paul, qui lui en a apporté d'autres avec de l'eau. Entre chez elle, à Orbe, et Villeneuve, où le couple vivait, Marie est restée au téléphone et a entendu insultes et lamentations 40 minutes durant. Arrivée à temps, elle a sauvé sa maman en la conduisant dans un hôpital du Nord vaudois, qui a dénoncé ces violences psychologiques.
Lundi, l'avocat de Paul a plaidé l'acquittement. «Il ne voulait pas qu'elle se tue», a-t-il soutenu. Une irresponsabilité passagère due à ses troubles ne peut pas être médicalement exclue. Selon le défenseur, il n'y avait pas de danger puisque la fille ne s'est pas rendue dans l'hôpital le plus proche et n'a pas alerté les secours. Verdict, mardi.
*Prénoms fictifs
«Nous étions tous deux alcoolisés. Je l'ai retrouvée dans cet état. Je n'ai rien fait. Je ne me souviens de rien»
Paul, prévenu d'incitation au suicide