Suisse: Pouvoir dénoncer les pilotes inaptes au travail

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SuissePouvoir dénoncer les pilotes inaptes au travail

L'Office fédéral de l'aviation civile souhaite obliger les médecins à signaler les pilotes qui ne sont pas capables d'accomplir convenablement leur mission.

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Daniel Bielinski, membre du comité de la Société suisse de psychiatrie et psychothérapie: «Il faudrait absolument introduire un droit de signaler pour les médecins.»

Daniel Bielinski, membre du comité de la Société suisse de psychiatrie et psychothérapie: «Il faudrait absolument introduire un droit de signaler pour les médecins.»

En Suisse, les médecins peuvent dénoncer les automobilistes inaptes à la conduite aux offices cantonaux de la circulation. Mais cette dérogation au secret médical ne s'applique pas aux pilotes d'avion.

Après le crash de l'Airbus A320, mardi passé dans les Alpes françaises, des politiciens suisses ainsi que l'Office fédéral de l'aviation civile (OFAC) voudraient obliger les médecins suisses à systématiquement dénoncer les personnes inaptes au vol. C'est ce que rapporte dimanche la «SonntagsZeitung». «Contrairement à la loi fédérale sur les routes, celle sur l'aviation civile ne prévoit aucun droit de dénoncer pour les thérapeutes», a rappelé Jürg Schlup, président de la Fédération des médecins suisses (FMH).

«Concrètement, cela signifie que les médecins peuvent dénoncer un pilote uniquement si celui-ci leur en donne l'autorisation ou si les autorités cantonales de la santé les autorisent à briser le secret médical.» Il faut noter qu'ils ont déjà l'autorisation de dénoncer un pilote en cas de danger imminent. Mais pour cela, le patient en question devrait explicitement affirmer qu'il compte continuer son travail malgré son incapacité. Or, le récent exemple du crash de l'avion Germanwings, où le copilote Andras Lubitz a volontairement caché son incapacité de travail à son employeur, remet en question les règles actuellement appliquées en la matière.

«Une loi insuffisante»

Pour Daniel Bielinski, membre du comité de la Société suisse de psychiatrie et psychothérapie, la loi suisse doit être modifiée: «Il faudrait absolument introduire un droit de signaler pour les médecins.» Un avis partagé par Jürg Schlup. L'Office fédéral de l'aviation civile ainsi que plusieurs politiciens vont encore plus loin en demandant une obligation de signaler. Le porte-parole de l'OFAC, Urs Holderegger, a expliqué au dominical que Berne allait prochainement se pencher sur la question. Le conseiller national Kurt Fluri (PLR/SO) souhaite introduire des exceptions au secret médical pour différents corps de métier. Selon lui, la thématique sera abordée très prochainement au sein de la commission des transports et des télécommunications. Les conseillers nationaux Martin Candinas (PDC/GR), Edith Graf (PS/TG) et Natalie Rickli (UDC/ZH) s'accordent à dire que la loi actuelle en la matière est «insuffisante».

Le copilote était traité pour troubles psychiques

La police allemande a découvert «un grand nombre de médicaments» destinés au traitement de troubles psychiques au domicile d'Andreas Lubitz, a affirmé samedi «Welt am Sonntag». Lors de leur perquisition menée à l'appartement du jeune homme à Düsseldorf (ouest), les enquêteurs auraient mis la main sur «un grand nombre de médicaments pour le traitement de maladies psychiques», rapporte l'édition dominicale du quotidien allemand «Die Welt».

Andreas Lubitz bénéficiait d'un arrêt maladie le jour du vol, selon une attestation d'un médecin retrouvée à son domicile de Düsseldorf, a révélé vendredi la justice allemande.

Des tests centrés sur le physique et non le psychique

Actuellement, seuls les médecins engagés spécifiquement pour évaluer l'aptitude d'un pilote ont l'obligation de signaler les personnes inaptes au vol. Le hic, c'est que les tests qu'ils font passer à leur patient servent principalement à évaluer l'aptitude physique et non psychique. Ainsi, Andreas Lubitz, le copilote qui aurait volontairement crashé l'A320 dans les Alpes françaises, avait passé avec succès le check-up annuel ordonné par Lufthansa.

Contactée, la compagnie Swiss confirme que les tests psychologiques ne sont pas effectués de manière systématique. Un pilote, qui souhaite rester anonyme, a expliqué à la «SonntagsZeitung»: «Les médecins ne s'occupent que du corps. Ils font des prises de sang et testent notre urine. Ils contrôlent aussi notre vue.»

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