Pénurie de personnelPrès de 6000 postes d’infirmiers sont à repourvoir
Le secteur de la santé tire la sonnette d’alarme. Épuisés, des jeunes pourtant motivés raccrochent souvent leur blouse.

Centre de soins intensifs aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), le 31 août 2021.
Aucun autre secteur n’affiche autant de postes vacants que celui de la santé, rapporte la «SonntagsZeitung». Selon les derniers chiffres, 5761 emplois d’infirmiers sont actuellement à repourvoir. Un record absolu. À la même période en 2019, ils étaient 4716, au début de la même année seulement 3626.
L’entreprise x28 a analysé les données actuelles. Le constat: la situation est due à une surcharge de travail, à l’épuisement et à la frustration du personnel soignant depuis la pandémie. «À chaque vague, nous avions espéré que notre équipe serait augmentée. Mais rien ne s’est passé, déplore une infirmière spécialisée. Aujourd’hui, nous sommes confrontés à la quatrième vague et nous avons moins de personnel que lors de la première.»
Risque accru d’erreurs
Yvonne Ribi, de l’Association suisse des infirmières et infirmiers (ASI), est alarmée face au nombre de personnes qui raccrochent leur blouse parce qu’elles ne voient plus de perspectives: «On nous parle de services où près de la moitié des infirmières expérimentées sont parties.» D’où une hausse de la charge pour ceux qui restent et, surtout, le risque d’erreurs: «Avec la situation actuelle, il est presque impossible de maintenir la qualité de soins requise», déplore-t-elle.
Initiative largement soutenue
Le 28 novembre, le peuple votera sur l’initiative sur les soins infirmiers. Elle exige une offensive en matière de formation, de meilleures conditions de travail pour éviter que les gens ne quittent la profession, et davantage de personnel infirmier dans les équipes pour garantir la qualité des soins. Selon une enquête de Tamedia, six semaines avant le vote, le pourcentage d’opinions favorables est de 82%.
Le Conseil fédéral et le Parlement jugent que l’initiative va trop loin et le Parlement a adopté un contre-projet indirect. Celui-ci prévoit que la Confédération et les cantons investissent près d’un milliard de francs dans la formation du personnel soignant au cours des huit années à venir. La contre-proposition ne prévoit toutefois pas de nouvelles réglementations en matière de conditions de travail et de salaires.
La pénurie ira croissant
Le dernier rapport national sur les soins met en lumière la gravité de la situation, rapporte la «SonntagsZeitung». Aujourd'hui, 185’600 personnes occupent des postes d'infirmiers dans des hôpitaux, des maisons de retraite, des maisons de repos et les soins à domicile Spitex. Mais dès 2029, il faudra 222’100 infirmiers pour répondre à la demande, soit près de 40’000 de plus. Et il en faudra autant pour remplacer les préretraités et les retraités. Le nœud du problème: bien que les cantons forment deux fois plus d'infirmiers qu'il y a dix ans, ils sont encore bien trop peu nombreux.
Le système a atteint ses limites
«Au lieu de de s'occuper des jeunes motivés à faire une telle formation, ils sont épuisés», constate Samuel Burri, spécialiste des soins infirmiers au syndicat Unia. Plus d'un tiers d'entre eux abandonnent dès la fin de leur formation. «La charge de travail est tout simplement immense.» Avec pour conséquence que de nombreux infirmiers et infirmières souffrent de maux de dos ou d'articulations, 70 % d'entre eux ont des problèmes de sommeil et près de la moitié se sentent épuisés, a montré une enquête menée par Unia auprès de 3500 aides-soignants. «Le système a atteint ses limites», déplore M. Burri.