Euro 2016«Prouver que les Anglais ne sont que des fillettes»
A Moscou, Vladimir est responsable des relations publiques pour une entreprise. A Marseille, il était samedi soir l'un des hooligans russes qui ont participé aux bagarres.
«Les Anglais disent toujours qu'ils sont les seuls hooligans. Nous sommes venus démontrer que les Anglais sont des fillettes», dit Vladimir, joint par l'AFP à son retour en Russie et qui ne souhaite pas donner son nom de famille pour ne pas être reconnu. Agé de 30 ans, le jeune homme a fait l'aller-retour Moscou-Marseille en moins de 48h pour assister à la rencontre entre la Russie et l'Angleterre (1-1), qui s'est soldée samedi soir par de violents affrontements entre les supporters russes et anglais. «J'ai vu les principales bagarres et j'y ai participé dans une certaine mesure, explique-t-il. Je me suis battu contre des mecs tatoués de 40 à 50 ans. On est tous venus pour ça. Le jour du match, tous les Russes ont pris l'avion (pour la France), il y avait environ 150 gars, les plus costauds», raconte-t-il, estimant le nombre total de hooligans russes à 500 ou 600.
Vladimir est fan du club moscovite Lokomotiv. Mais quand l'équipe nationale joue, le club de cœur des «ultras» russes n'a plus d'importance. «L'important, c'est qu'on vienne tous de Russie, que nous nous battions contre les Anglais!» résume-t-il. Au départ, les hooligans russes n'ont pas hésité à s'allier avec leurs ennemis anglais pour «attaquer les Arabes pour se venger», dit-il, sans préciser les raisons de cette vengeance. «Je ne dirais pas que c'est du racisme, mais c'est vrai que c'est plus facile pour les Russes et les Anglais de s'attaquer ensemble aux Arabes, c'est une sorte de solidarité», déclare-t-il.
«Rien ne les arrêtera»
Très vite cependant, la solidarité entre supporters d'équipes adversaires a vécu et les Russes se sont mis «à frapper les Anglais» après avoir essayé de voler les emblèmes de leur équipe. Pour Vladimir, seuls les hooligans russes se battent «avec honneur». «Nous, nous n'utilisons jamais d'armes improvisées, seulement nos poings», tandis que «les Anglais utilisent des chaises, des bouteilles». «On fait ça pour le sport (...) perdre contre eux revient à perdre notre honneur», ajoute-t-il. Le jeune homme, à la vie rangée lorsqu'il est à Moscou, dresse le portrait du hooligan russe: «entre 20 et 30 ans, sportif, amateur de boxe et de toutes sortes d'arts martiaux». «Si vous voyez quelqu'un avec un drapeau russe ou un T-shirt aux couleurs de la Russie, ce n'est jamais un hooligan, ajoute-t-il. Nous devons nous fondre dans la foule.»
Avec des protège-dents, des gants et des couteaux
Les Russes qui se sont battus avec les Anglais à Marseille étaient très équipés, selon le responsable de l'unité spécialisée dans le football de la police britannique.
«Une petite minorité de supporters anglais étaient à Marseille pour causer des problèmes», explique Mark Roberts, responsable de l'unité spécialisée dans le football de la police britannique au quotidien britannique «The Guardian». Mais les fauteurs de trouble russes étaient «beaucoup plus nombreux», ajoute-t-il. «Nous pensons qu'ils étaient 300 environ.» «Nos spotters (physionomistes dans le jargon du foot) à Marseille les ont vus mettre des protège-dents, des gants de combat et des bandanas avant d'attaquer les supporters anglais sur le port», affirme M. Roberts.
«Nous savons que certains avaient des couteaux, parce qu'un supporter anglais a été poignardé. Ils portaient une sorte d'uniforme – ils avaient tous des T-shirts et des habits noirs et beaucoup portaient des bananes, peut-être pour dissimuler des armes», ajoute-t-il. Les violences dans les rues de Marseille ont fait 35 blessés en marge du match de l'Euro 2016 Angleterre-Russie samedi, dont trois dans un état grave.
Rappelons que l'UEFA, qui gère l'Euro 2016, a menacé l'Angleterre et la Russie de «disqualification» du tournoi «en cas de nouvelles violences» de leurs supporters.
(20 minutes/afp)