Genève«Se mobiliser pour lutter contre cette m... de virus!»
Résignés mais compréhensifs, les commerçants ont clos leur enseigne lundi soir pour freiner le coronavirus. Reportage.
- par
- David Ramseyer

Ce célèbre pub du centre-ville de Genève a fermé ses portes pour la première fois depuis plus de 25 ans.
«On boit un dernier coup en terrasse avant, ben... avant longtemps sans doute», soupire ce couple attablé devant un pub du centre-ville de Genève. A l'intérieur, les tables sont dressées pour un repas qui n'aura jamais lieu. Afin d'enrayer la pandémie, les autorités ont ordonné la fermeture des bars, restaurants et commerces non essentiels pour 18h, ce lundi; et ce, au moins jusqu'au 19 avril.
«Je n'avais jamais fermé un seul jour depuis 1994, rembobine Mahrez Agrebi, le patron du pub. Au début, on pensait que seuls les gros événements comme le Salon de l'Auto allaient être annulés et qu'on ne serait pas forcément touchés. Mais quand j'ai vu ce qui se passait en Italie ou au Tessin... Depuis quelques temps, je m'attendais à cette mesure». L'homme précise qu'il profitera de ces prochaines journées sans activité pour faire «un grand nettoyage et des réparations» dans son établissement.
A l'instar de tous les commerçants rencontrés lundi, le restaurateur dit appuyer la décision de l'Etat. Mahrez Agrebi a rempli dans la matinée des demandes de chômage partiel pour ses employés. «C'est triste, mais il faut se mobiliser pour combattre cette m... de virus!»
Une dernière journée faste
La mesure n'a pas non plus surpris Maxence Dumontet, propriétaire d'un magasin spécialisé dans les jeux de société. «Il y a plusieurs jours, j'ai revu les plannings, annulé nos événements et freiné nos commandes. On va continuer avec la vente en ligne.» Le jeune homme dit ne pas craindre pour son activité; mais si ça se prolonge, «ça sera délicat». Un sourire amer aux lèvres, il avoue que, ce lundi, il a eu «plus de clients qu'une journée juste avant Noël! Les gens ont fait leurs provisions de jeux et beaucoup sont venus nous soutenir.»
Toute la Suisse est en état durgence à cause du coronavirus. Seuls les commerces de première nécessité pourront rester ouverts. Le Conseil fédéral a décrété lundi létat de situation extraordinaire, prenant ainsi seul les commandes de la crise.
Pareil pour le gérant d'une lunetterie voisine, à qui un client a proposé d'organiser un crowdfunding s'il éprouvait des difficultés financières. Pour l'heure, il ne reçoit que sur rendez-vous depuis samedi, «mais je ne sais pas si je peux continuer», avoue Paul Trunz, masque sur la bouche et désinfectant à la main. Il note que les commerces non essentiels doivent fermer, «sauf que pour un client très myope, remplacer des lunettes cassées est essentiel. Alors que faire? Personne ne m'a répondu à l'Etat.» Ce dernier cristallise par ailleurs les espoirs des commerçants. Tous escomptent une aide financière de sa part. «Je peux tenir, mais pas longtemps», avoue Olivier Grandjean, garagiste «désespéré».
Avant un éventuel confinement en raison de lépidémie de coronavirus, de longues files dattente se forment devant les supermarchés parisiens, avec des distances de sécurité entre les clients.
Face à une mesure qu'il juge «sage et que tout le monde respectera, j'espère», Nicolas Paulin, à la tête d'un petit restaurant, reste philosophe. «Vendredi on nous apprenait que l'accueil était limité, on a fait des courses en conséquence samedi, et aujourd'hui, on nous dit que c'est fini. Mais la santé doit prédominer sur la tristesse.»