SuisseUn Romand fait la guerre en Ukraine: «C’est un carnage»
Ce père de famille a rejoint les troupes de combattants étrangers en septembre dernier. Il a raconté son quotidien à la SRF et déconseille à tous de s’engager.

Le Romand «Jérôme» dans les tranchées de l’est de l’Ukraine
Un Romand de 37 ans, père de deux ados a décidé de répondre à l’appel du président ukrainien Zelensky et de rejoindre la Légion internationale des combattants étrangers. Il témoigne de son quotidien sur le front via des vidéos et des images qu’il envoie à la SRF, selon l’émission «Rundschau» diffusée mercredi soir.
L’homme, dont on ne connaît pas l’origine en Suisse romande, s’est engagé en septembre 2022 après s’être mis en relation avec des combattants étrangers via les réseaux sociaux. Après s’être entraîné dans des camps militaires, il est intégré dans une unité spéciale. La troupe internationale se bat sur le front dans la région de Louhansk.
C’est là qu’il vit en novembre 2022 un drame qui le hante. Le Romand, que la SRF nomme «Jérôme», doit traverser un champ miné par les Russes avec ses camarades. Une mine explose et il est frappé au visage. Mais un ami polonais, apprécié de tous, grièvement blessé, meurt dans d’atroces souffrances. «Nous étions six à essayer de le réanimer. Mais il avait beaucoup de débris dans le corps», raconte-t-il.
Il y retourne une 2e fois
Après une mission délicate en janvier dernier, Jérôme décide de rentrer en Suisse. Il en a assez de la guerre. «Nous avons passé la nuit au front dans un village. Les drones lançaient des grenades tout le temps. Ça reste dans la tête», se souvient-il. Et il déconseille à tous de s’engager. «Car c’est un carnage et on est obligé de voir un ami mourir ou de côtoyer sans cesse des morts».
Pourtant, Jérôme est reparti en Ukraine cet été. Mais l’unité dans laquelle il a combattu n’existe plus. Il tente donc d’en rejoindre une nouvelle. Il faut dire que rien ne le retient en Suisse. Technologue du lait de formation, il n’a pas de travail et vit de l’aide sociale. Il n’a en outre que peu de famille car il a vécu enfant dans un foyer. «J’y retourne parce que je veux faire quelque chose de ma vie. Je m’ennuie à la maison», a-t-il expliqué à la SRF.
A noter que ce n’est pas le premier Suisse à s’engager. Un sniper habitant Schaffhouse avait lui aussi décidé de se battre aux côtés des Ukrainiens.
Servir une armée étrangère est passible de 3 ans de prison
Jérôme le sait mais il passe outre. En effet, il est interdit aux Suisses de se mettre au service d'une armée étrangère. Ceux qui s’engagent quand même risquent une peine de prison pouvant aller jusqu'à trois ans ou une amende. C’est ce que prévoit l’article 94 du Code pénal militaire (CPM). Il stipule que: «Tout Suisse qui, sans l’autorisation du Conseil fédéral, aura pris du service dans une armée étrangère sera puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire». L’interdiction de s’enrôler dans une armée autre que la Suisse est en vigueur depuis 1859.
Près de 2000 étrangers sur le front
Selon l’expert Kacper Rekawek, interrogé par SRF, entre 200 et 250 volontaires étrangers sont morts en Ukraine depuis février 2022. Environ 20’000 étrangers se sont portés volontaires pour aller prêter main-forte à l’armée ukrainienne, selon des estimations. Et 2000 seraient actuellement engagés. En plus des combats, ils sont souvent affectés à des tâches logistiques. Mais l’armée ukrainienne ne publie pas de chiffres - ni sur les étrangers qui combattent actuellement sur le front, ni sur ceux qui sont tombés ou ont été blessés.