Vaud – Une initiative veut «stopper l’éventrement» de la colline du Mormont

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VaudUne initiative veut «stopper l’éventrement» de la colline du Mormont

Des représentants de plusieurs partis politiques et associations lancent une initiative cantonale pour sauver le Mormont, exploité par le cimentier Holcim. Le texte entend aussi «questionner notre dépendance au béton». L’entreprise dénoncée réagit.

La récolte des signatures pour l’initiative «Sauvons le Mormont» sera lancée vendredi. 

La récolte des signatures pour l’initiative «Sauvons le Mormont» sera lancée vendredi.

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«C’est le dernier moment pour protéger ce qu’il reste du Mormont, hot spot de la diversité du canton», a déclaré mercredi matin, en conférence de presse, Alain Chanson, président de l'Association de sauvegarde du Mormont (ASM), créée en 2013. Avec les représentants de nombreux partis politiques et associations, ils lancent désormais une initiative pour inscrire dans la Constitution vaudoise, la protection de la colline située près d’Eclépens (VD).

L’initiative «Sauvons le Mormont» promeut la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre et le réchauffement climatique. Pour rappel, la colline est utilisée comme carrière par le cimentier Holcim depuis les années 1950. Elle est aussi devenue la première ZAD de Suisse fin 2020; une «mise en lumière», qui a permis de démontrer que «la colline mérite une protection légale à la hauteur de ses richesses».

Pas de soutien des zadistes

Réinventer l’écosystème urbain

Au-delà de vouloir protéger la faune et la flore – soit plus de 900 espèces, dont plusieurs protégées – qui vivent sur la colline, les initiants souhaitent «questionner notre dépendance au béton» et «encourager les matériaux de construction alternatifs au béton, durables et locaux». Parmi eux, on compte le bois, le liège et la paille, notamment.

La conférence de presse du comité s’est d’ailleurs tenue dans un quartier emblématique, puisque Malley verra bientôt se dresser la première tour en bois de Suisse romande, «symbole de ce changement de paradigme nécessaire et possible dans la construction». «Le béton est utilisé par dépit. Il est considéré comme étant la matière la moins onéreuse», ajoute Martin Peikert, représentant de solidaritéS Vaud, qui voit cet argument comme de la poudre aux yeux.

Une partie du comité d’initiative «Sauvons le Mormont». 

Une partie du comité d’initiative «Sauvons le Mormont».

lvb

Bernard Borel, médecin et représentant du POP, explique aussi qu’en plus d’être à l’origine de nuisances sonores pour la population, «l’extraction et la fabrication du ciment engendrent une pollution atmosphérique et donc des maladies respiratoires». Il rappelle que «Holcim représente 10% des émissions de CO₂ du canton de Vaud». Le politicien parle d’une «initiative emblématique» visant à insuffler un changement de paradigme à plus large échelle. Pour que la question soit soumise au peuple, le comité dispose jusqu’au 16 mai pour recueillir les 12'000 signatures. La récolte sera lancée vendredi.

Recours au Tribunal fédéral

La lutte pour le Mormont ne date pas d’hier. Dans les années 1990, l’association ProNatura s’était battue pour que le sommet de la colline soit classé dans l’Inventaire Fédéral des Paysages (IFP). Aujourd’hui, ce dernier est «menacé par les extensions successives de l’exploitation de Holcim», estiment les initiants.

Inscrit dans un plan d’affectation cantonal (PAC), le projet de la Birette fait l’objet d’un recours déposé à l’été 2020 par des associations de protection de l'environnement. Un arrêt du Tribunal fédéral est toujours attendu. En cas d’acceptation du projet, les prochaines étapes seraient le défrichement, le décapage des sols, puis l’exploitation de la roche.

«Une telle opération réduirait quasiment à néant le passage à faune identifié dans le réseau écologique cantonal», dénonçait une motion déposée au Grand Conseil en avril dernier. Une vingtaine de députés ont aussi manifesté leur volonté de mettre fin à toute nouvelle extension de la carrière.

Holcim, «ouverte au dialogue»

L’entreprise Holcim, qui prend note de l’initiative, se dit «ouverte au dialogue». «Nous sommes conscients que la production de ciment et de matériaux de construction est gourmande en énergie et en ressources. C'est pourquoi nous investissons dans des mesures visant à réduire notre empreinte environnementale», réagit, en fin de journée, Arthur Got, porte-parole de la société. Ce dernier explique que la cimenterie d’Eclépens est d’ailleurs «l’une des plus efficientes d’Europe».

Mobilisant l’économie circulaire, le site vaudois «produit sa propre électricité grâce une installation solaire de 3’650 m2 et à une turbine qui valorise plus de 90 % de la chaleur résiduelle de l’usine». Arthur Got rappelle que «la production du ciment Susteno, lancée l’an dernier, préserve à la fois les ressources naturelles et réduit les émissions de CO2 d’environ 10% par rapport à un ciment de masse suisse déjà optimisé».

Le porte-parole souligne aussi l’importance du béton, permettant de réaliser des projets tels que le métro M2 de Lausanne, le Vortex, la STEP de Vidy, ou l’Hôpital des enfants du CHUV en devenir.

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