Football«Vous connaissez une ligue à huit équipes?»
La formule 12+8 a-t-elle pensé à la Challenge League? Les avis d'Andrea Binotto et de Claude Gross.
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- Sport-Center

Puisque la SFL a acté le «grand jour» au 29 mai, tout le monde pourra continuer à y aller de sa proposition miracle pendant encore au moins deux semaines. Or sans juger de la qualité des différents plans de relance, un constat s'impose: la Challenge League y joue toujours un rôle de faire-valoir. C'est un peu «sauvons le soldat Super League»... Et pour le reste, advienne que pourra.
Prenez la fameuse solution du «12 + 8» qui soulagerait Lausanne-Sport et récupérerait peut-être l'ex-futur nouveau riche GC. L'élite aurait de quoi se frotter les mains. Mais à quel prix pour la Challenge League? «Vous connaissez un championnat à huit équipes? Moi j'ai cherché, je n'ai pas trouvé, s'interroge un Andrea Binotto un peu circonspect. Mais si c'est dans l'intérêt supérieur du football suisse, alors pas de problème.»
Aucune vision à long terme
L'entraîneur du Stade-Lausanne-Ouchy en fait une affaire de principes: l'heure est assez grave pour placer l'intérêt collectif en première ligne. Or il l'avoue à demi-mot: toutes ces propositions et remarques dictées par l'urgence du moment l'agacent. «Tout le monde vient avec sa solution mais je vois que des projets orientés. Il n'y a ni analyse ni vision à long terme. Je ne veux donc pas prendre position. D'autant plus que si je déclare que je suis contre une Challenge League à huit, on pensera que le coach du SLO ne soutient pas le LS.»
Andrea Binotto se contente donc de rappeler une vérité qui devrait faire réfléchir les clubs de Super League d'ici au 29 mai. «Lors du vote qui a refusé le passage à 12 équipes en Super League, l'avenir de la Challenge League était totalement flou. On entendait des rumeurs qui allaient d'une ligue à huit jusqu'à sa disparition pour fusionner avec la Promotion League. Jamais il n'y a eu un dessein clair sur son avenir. Selon moi, c'est cet oubli qui a poussé les clubs de Challenge League à voter contre.»
16 plutôt que 8 pour accueillir les M21
Andrea Binotto parle poliment d'oubli mais la réalité fait plutôt penser à une forme de mépris. Or un consensus pour le football suisse passera aussi par un projet viable pour la deuxième division. «La Challenge League est d'une importance folle pour les jeunes joueurs. Or dans cette logique, cela fait longtemps qu'elle aurait dû être augmentée, à 16, 18 ou 20 équipes, explique Claude Gross, consultant Teleclub. Aujourd'hui, seules trois équipes M21 disputent le championnat de Promotion League, Sion, Bâle et Zurich. Les autres jouent en 1re ligue ce qui n'est plus le football professionnel.»
On ne gagne pas un vote avec du mépris
Et l'ancien entraîneur du Mont de donner du relief à son argumentation. «Pour prendre confiance et franchir le dernier palier vers la Super League, ces jeunes doivent impérativement jouer. C'était le cas de Jonas Omlin, de Numa Lavanchy ou de Benjamin Kolloli lorsqu'ils ont débarqué chez nous. Omlin arrivait des M21 de Lucerne, il n'avait aucune idée où il mettait les pieds. Mais il a joué. Et cette étape l'a conduit vers Bâle et l'équipe de Suisse. Déjà dans une Challenge League à dix équipes, c'est compliqué de donner cette chance aux jeunes car il n'y a pas de ventre mou. Alors à huit... Même si je comprends qu'il s'agit d'une mesure d'urgence qui se veut provisoire, sur le fond, c'est une hérésie, au mieux une plaisanterie.»
Voilà un avertissement qu'il s'agira d'entendre avant le vote du 29 mai. Si les puissants du football suisse veulent passer à douze, ils ont intérêt à imaginer un vrai concept de développement pour la Challenge League. Car pour rappel, le vote de Wil, Winterthour ou Kriens vaut le même poids que celui de Bâle, YB ou Servette.
Mathieu Aeschmann