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Procédure de destitution
13 novembre 2019 17:21; Act: 14.11.2019 04:49 Print
Un témoin clé renforce l'accusation contre Trump
Les auditions publiques concernant l'affaire ukrainienne ont débuté mercredi au Congrès américain avec deux diplomates.

William Taylor (photo), ambassadeur par intérim à Kiev et ancien militaire, et George Kent, sont auditionnés par le congrès. (Photo: AFP)
Un témoin clé a décrit mercredi un Donald Trump obsédé par sa campagne de réélection au point de faire pression sur l'Ukraine, lors des premières auditions parlementaires télévisées dans l'enquête pour déterminer si le président américain doit être destitué. Dénonçant une «mascarade», Donald Trump a affirmé avoir été «trop occupé» pour regarder ces auditions, qui ont mis en évidence le franc soutien dont il dispose toujours chez les républicains.
La justice rejette un recours de Trump sur la transmission de ses documents financiers au CongrèsUne cour d'appel américaine a de nouveau rejeté mercredi un recours de Donald Trump, qui souhaitait voir réexaminée une précédente décision de justice autorisant le Congrès américain à lui réclamer des documents sur ses finances au Congrès. Son avocat, Jay Sekulow, cité par des médias américains, a immédiatement annoncé que l'affaire serait portée devant la Cour suprême. Les démocrates soupçonnent notamment l'ancien magnat de l'immobilier d'avoir gonflé la valeur de ses avoirs pour obtenir des prêts, mais aussi de dissimuler de potentiels conflits d'intérêts. Pour en savoir plus, une commission de la Chambre des représentants avait ordonné en avril à l'ancienne entreprise comptable de Donald Trump de lui transmettre toute une série de documents financiers, notamment des comptes-rendus d'audit ou des bilans annuels d'activité. La Maison Blanche, qui dénonce un «harcèlement», avait saisi la justice pour bloquer cette injonction. Mais cette lecture a été rejeté en mai par un juge de Washington, dont la décision a été confirmée en octobre par une cour d'appel. Mercredi, les juges ont refusé de réévaluer le cas.
Ancien combattant au Vietnam, cheveux gris et visage aux traits sévères, l'ambassadeur américain de facto en Ukraine, William Taylor, a ouvert le bal de ces dépositions historiques aux côtés d'un autre diplomate de carrière, George Kent, haut responsable du département d'Etat spécialiste de l'Ukraine. Les démocrates soupçonnent le milliardaire républicain d'avoir abusé de ses pouvoirs présidentiels en demandant à Kiev d'enquêter sur Joe Biden, bien placé pour l'affronter en novembre 2020 à la présidentielle.
WATCH: Top moments from the first public impeachment hearings into Pres. Trump, as top U.S. diplomat in the Ukraine Amb. William Taylor and Deputy Assistant Sec. of State George Kent testified before the House. https://t.co/AehoqjMyWIpic.twitter.com/V90HBjTUCv– ABC News (@ABC) November 13, 2019
Forts de leur majorité à la Chambre des représentants, ils ont ouvert fin septembre une enquête pour constituer un dossier de mise en accusation, l'«impeachment» en anglais. Avant Donald Trump, seuls trois présidents américains avaient été visés par une telle procédure explosive. Aucun n'a été démis de ses fonctions.
Après six semaines d'auditions à huis clos, les démocrates espèrent faire basculer l'opinion publique grâce à ces témoignages retransmis sur les grandes chaînes d'information. Mais il n'est pas évident que les auditions fleuves de mercredi, menées par des élus républicains et démocrates aux vues diamétralement opposées, aient fait bouger des électeurs très polarisés.
Avancer «sans délai»
William Taylor a rapporté les propos de l'ambassadeur américain auprès de l'Union européenne, Gordon Sondland, selon qui le président américain «s'intéressait» davantage à l'ouverture d'une enquête sur Joe Biden en Ukraine qu'à la situation dans ce pays. Sous serment, il a surpris en révélant avoir appris vendredi l'existence de cette déclaration faite le 26 juillet, juste après un entretien entre Donald Trump et Gordon Sondland.
«Je ne sais rien là-dessus», a affirmé Donald Trump, interrogé plus tard sur ces propos à la Maison Blanche. «Première fois que j'entends cela», a-t-il ajouté en balayant les informations de «seconde main» des témoins. Une ligne d'attaque martelée au Congrès par les républicains qui leur ont reproché de rapporter des propos parfois de deuxième voire «troisième» main.
Don't rely on second, third, and fourth-hand accounts. Read the transcript for yourself. https://t.co/wfHIQ0aO76– The White House (@WhiteHouse) November 13, 2019
Avec une dizaine d'auditions prévues d'ici au 20 novembre, les démocrates veulent mener leur enquête sans «délai». Leur confortable majorité à la chambre basse laisse peu de doutes sur l'«impeachment» du président américain. Compte tenu de la majorité républicaine au Sénat, il est en revanche peu probable que Donald Trump soit ensuite destitué, car la chambre haute, qui serait chargée de le juger, aurait le dernier mot.
En attendant, le cadre des investigations est clair, a affirmé Adam Schiff, président de la commission du Renseignement qui mène l'enquête: Donald Trump «a-t-il invité l'Ukraine à s'ingérer dans nos élections?» A-t-il commis un «abus de pouvoir?»
This impeachment inquiry aims to answer a simple, yet deeply troubling question:Did the president invite or coerce a foreign nation to interfere in our election for his own political gain?If the answer is yes, what we do now will have a lasting impact on our democracy. pic.twitter.com/Td0PoCPWMw– Adam Schiff (@RepAdamSchiff) November 13, 2019
Comme levier, le milliardaire aurait suspendu une aide militaire de quelque 400 millions de dollars destinée à Kiev, et mis dans la balance une possible invitation du nouveau président ukrainien, Volodymyr Zelensky, à la Maison Blanche.
Au cours d'une conversation téléphonique le 25 juillet, Donald Trump a bien demandé à son homologue ukrainien de «se pencher» sur Joe Biden et son fils, Hunter, qui a été employé par une compagnie gazière ukrainienne. Cet appel avait alarmé plusieurs hauts responsables, au point qu'un lanceur d'alerte avait décidé d'en alerter sa hiérarchie. Cet appel était «parfait», martèle le président américain depuis.
«Répugnant»
Dans son témoignage mercredi, William Taylor a affirmé qu'un canal diplomatique «irrégulier» avait été mis en place avec l'Ukraine, dirigé par l'avocat personnel de Donald Trump, Rudy Giuliani. «A la mi-août, il m'est apparu évident que les efforts de Giuliani pour concocter des enquêtes politiques contaminaient désormais» les relations entre Kiev et Washington, a renchéri George Kent.
Bill Taylor: "The odd push to make President Zelensky publicly commit to investigations of Burisma and alleged interference in the 2016 election showed how the official foreign policy of the Untied States was undercut by the irregular efforts led by Mr. Giuliani." pic.twitter.com/LATT5pZbet– The Hill (@thehill) November 13, 2019
William Taylor a également répété trouver «dingue» qu'une aide militaire destinée à l'Ukraine puisse avoir été gelée «en échange» de l'ouverture d'enquêtes sur des rivaux de Donald Trump. «Ceci n'est pas arrivé», a tonné l'élu républicain Jim Jordan, en soulignant que l'aide avait été finalement débloquée en septembre, sans que Kiev n'annonce d'enquête sur les Biden.
C'est là une autre ligne centrale de la défense des républicains: on ne peut pas accuser Donald Trump d'avoir exercé un chantage s'il n'en a rien tiré, et que l'enveloppe d'aide a été attribuée. Mais, a insisté Adam Schiff, «un stratagème (...) n'en devient pas moins répugnant parce qu'il a été découvert avant d'être totalement mené à bout».
(nxp/afp)